• Quelques sculptures de Roger Bésus (1915-1993), écrivain et artiste, auquel Xavier Soleil a consacré un article dans lovendrin n°14 (http://lovendrin.oldiblog.com/?page=articles&rub=248348). Les photos 1 à 10 sont des oeuvres faisant partie d'une collection particulière. (c) lovendrin Les photos 11 et 12: ???
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  • MAZETTE

    Français.

    - L’art contemporain, cher au ministre de la C. et de la C., R. D. de V., va bénéficier d’un «plan d’action et de développement». Rien de choquant puisque l’art contemporain est l’art officiel: à ce titre il doit être soutenu. Soutenu et enseigné: le Centre Européen de Création contemporaine projeté servira aussi à cela. Le caractère pervers de ce plan d’action s’affirme dans la volonté de mêler art contemporain et patrimoine: des œuvres seront prêtées aux musées régionaux et la Galerie des Gobelins rouvrira pour des expositions «alliant l’art contemporain et les collections nationales de tapisseries et mobiliers», histoire que la confusion s’établisse et que prévale l’idée d’une continuité créative, d’une parfaite égalité entre les époques - alors que l’art contemporain revendique le principe de rupture totale avec le passé.

    Américain. -

    Le milliardaire Steve Wynn a percé d’un coup de coude un Picasso de sa collection. «Oh m..., regardez ce que j’ai fait», a-t-il lancé après avoir perforé la toile alors qu’il la montrait à des amis. Il s’apprêtait à la revendre au prix de 139 000 000 $, «la plus grosse somme d’argent jamais payée pour une peinture» selon lui - une réflexion à la hauteur de ses préoccupations esthétiques.

    Etasunien. -

    La Kesting Gallery, à New York, s’enrichit d’une nouvelle création de Daniel Edwards: Suri Cruise’s First Poop, comprenez: «premier popo de la fille des très-médiatiques Katie Holmes et Tom Cruise». Pas tout à fait de l’art pour l’art, malgré les apparences, puisque le bronze est mis aux enchères au profit d’une association humanitaire (pour une valeur estimée de 10 000 $). Une précédente sculpture de Daniel Edwards, aux rayons immondices, était plus ambitieuse: la chanteuse Britney Spears accouchant à quatre pattes sur une peau d’ours. Ce monument se voulait «Pro-Life», hommage à une femme qui privilégie sa famille et non sa carrière. Telle est la forme plastique que prennent les bons sentiments quand ils s’expriment de façon moderne (l’hyper-réalisme étant l’une des deux ornières de l’art contemporain).

    GAZETTES

    Local. -

    Dans la Gazette du Val d’Oise du 20/09/06, aperçus du procès d’un exhibitionniste (multirécidiviste et en psychothérapie) devant le Tribunal correctionnel de Pontoise: «Le psychiatre dit que c’est pour combattre ma timidité que je fais ça. Le juge d’application des peines estime qu’il faut beaucoup de courage pour se mettre nu en public et que je devrais maintenant utiliser ce courage pour aller vers les autres.» Du courage et de la timidité en effet, puisqu’il cible les adolescentes (sa plus jeune victime avait onze ans). Pour le reste: jet de pierres sur le train Survilliers-Paris, tandis que le Saint-Lazare-Gisors est stoppé sur les voies, caillassé, tagué ; ailleurs deux personnes sont agressées par vingt autres armées de battes et de barres de fer. J’oubliais: le déjeuner champêtre du Front National n’aura pas lieu à épinay-Champlâtreux, grâce à l’intervention du maire. Tout va donc très bien.

    Ecclésial. -

    Lecture instructive que celle de l’éditorial de La Vie du 14 septembre dernier, à l’image de son auteur Jean-Pierre Denis: bien-pensant impitoyable. Reprochant à l’abbé Laguérie d’avoir été «successivement catholique, lefebvriste et sans-église-fixe», il montre dans quelle estime il doit tenir les «sans», sans-domicile ou sans-papiers; son sens bourgeois des convenances est heurté par le fait que l’abbé Laguérie ait célébré les obsèques d’un condamné et qu’il ait été, un temps, «au centre d’un procès». On l’aura compris: J.-P. D., ami de l’ordre public et soucieux de «l’émotion de nos nombreux lecteurs protestants et orthodoxes», n’apprécie pas «cet agitateur». D’où une rafale de questions: «êtes-vous d’accord, abbé Laguérie?... Mais alors, que faites-vous...? êtes-vous d’accord, abbé Laguérie?... Mais alors, continuerez-vous...? êtes-vous d’accord, abbé Laguérie?... Mais alors, que dites-vous...? êtes-vous d’accord, abbé Laguérie?...» être assesseur d’un inquisiteur ne lui aurait apparemment pas déplu: M. Denis aime être du côté du manche. Notre époque, qui méconnaît les talents, lui a donné un emploi de Père Fouettard à La Vie, ce magazine qui porte «un regard ouvert et généreux sur l’actualité».

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  • La poésie est bien mal en point, depuis plus d’un demi-siècle. Non qu’on n’en veuille plus : on en veut, comme le montre le succès de quelques chanteurs français de variété, chez qui la poésie, fatiguée, semble être en villégiature. On trouve chez tel ou tel, des traits poétiques qui, sans atteindre des sommets, gardent une authenticité et un charme certains, lesquels charme et authenticité font cruellement défaut aux poètes professionnels, qui tournent à vide, ayant fait du contournement un maniérisme dont ils ne se dépêtrent point. René Char – tu aurais mieux fait de partir, René Char ! –, que son passé de résistant a élevé au rang de prince des poètes, reste le meilleur exemple d’obscurantisme :

    pour l’abondance

    de larme répandue

    du haut

    en bas

    par le bas au plus haut trop grande foi

    par jeu vie perdu

    de soif

    mourir par abondant défaut

    Je m’égare : il me revient que, sous cette orthographe et disposition typographique contemporaine, se cache en fait un quatrain de Nostradamus :

    Pour l’abondance de larme respandue,

    Du haut en bas par le bas au plus haut :

    Trop grande foy par ieu vie perdue,

    De soif mourir par abondant defaut.

    (Centurie VIII, C)

    Nostradamus prophétisait en vers, nos poètes versifient des obscurités. La filiation s’établit aisément par les romantiques qui ont fait du poète un prophète (celui-ci parlait encore clair), et par Rimbaud qui en fit un voyant pas toujours lumineux ; Mallarmé accrût l’obscurité. Nous en sommes aux poseurs de devinettes sur la route de Thèbes.

    Ne désespérons pas. Le xviiie eut aussi son désert. Sûrement qu’en ce moment deux trois poètes inconnus écrivent les vers qui nous réjouiront demain. Quant à la poésie, qui était ainsi vêtue du temps d’André Chénier :

    L’amiante et la soie, en un tissu divin,

    Répandaient autour d’elle une robe flottante

    (Bucolique)

    victime de la loi contre l’amiante et grande pudique, elle s’est retirée dans ses appartements. Quand reviendra-t-elle ? Dans quels atours de quel couturier ? Ce sera en tout cas une belle surprise. Alors rentreront dans le néant tous ces « poèmes » qui ne sont rien, suivant ce que disait déjà le bienheureux Raymond Lulle : «Les écrits inintelligibles sont comme s’ils n’avaient jamais été écrits.»1 

    I.

    Qu’on ne sache pas profiter de la poésie déjà chantée est autrement plus grave que cette éclipse. Quel massacre ! On ampute allègrement les vers de tel ou tel pied en ne tenant pas compte de la diérèse et du e muet, sans entendre que cela claudique. Vulcain dansant… Or la poésie est avant tout une question de rythme. D’après la définition donnée par Edgar Poe, elle est « une création de beauté par le rythme », définition générale, valable pour toute langue, précise et sûre, contrairement à tant d’autres qui se crurent obligées d’être nébuleuses parce que la poésie a quelque chose de céleste. Ce principe du rythme est la base de toute réflexion sur la poésie. Pour avoir méconnu ce principe (les traités de versification courants consacrent grosso modo un paragraphe à la prosodie et le reste du livre à répertorier les vers, les strophes et les licences – ce sont des catalogues et non des traités), nos Modernes ont appelé archaïsmes des procédés intimement liés à l’expression du rythme.

    Le français, comme toute langue, a son rythme propre, qui naît de la succession de syllabes accentuées et non-accentuées (temps forts, temps faibles). L’accent tonique en français se pose sur la dernière syllabe prononcée du mot. Cette accentuation vient de l’évolution des mots latins, qui se répartissaient en trois catégories suivant leur accentuation,

    1. mots oxytons : les mots d’une syllabe. L’accent reste sur cette unique syllabe en français. Ex : sal, sel.

    2. mots paroxytons, accentués sur l’avant-dernière syllabe. La dernière syllabe a disparu et la syllabe accentuée est devenue finale. Ex : bonitate, bonté.

    3. mots proparoxytons, accentués sur l’antépénultième. La réduction syllabique aboutit au placement final de la syllabe accentuée. Ex : opera, œuvre.

    Cet accent tonique sur la dernière syllabe est la clé de la poésie française.

    L’initiation à la poésie devrait passer par cette prise de conscience de l’accent tonique. Apprendre à « mettre le ton » est bien ; « entendre l’accent » devrait être enseigné dès que possible.

    *

    Cependant, dans un groupe de mot formant grammaticalement un tout, la tendance est d’accentuer le dernier mot du groupe, les accents des mots précédents disparaissant. Comparez : la maison est belle et la belle maison ! L’accent n’est donc pas fixe : la poésie va abondamment jouer de cette variabilité. Bien sûr, la suppression des accents ne peut se faire que si le nombre de syllabes concernées est restreint, car –on revient au principe – la phrase a besoin d’accents. Ainsi « belle » sera accentué si on ajoute une syllabe à ce même groupe nominal : la très belle maison ! Cette obligation d’avoir des accents nous permet de poser comme loi que quatre syllabes peuvent se contenter d’un seul accent final, alors que cinq et plus demandent un second accent intérieur, qui sera légèrement plus faible que le final. Le même phénomène se constate pour les mots de plus de quatre syllabes. Quelques exemples chez Chrétien de Troyes :

    Felenessemant s’antr’espruevent

    (Yvain, v. 835)

    Par sa longueur, ce mot réclame un second accent : un accent intérieur, comme pour un groupe de mots. Le mécanisme est le même. Il semble qu’il puisse recevoir cet accent indifféremment sur la deuxième ou troisième syllabe (felenessemant ou felenessemant) ; cependant, si on replace le vers dans son contexte, la première solution est la bonne :

    Et sor les piz, et sor les hanches,

    essaient les espees blanches.

    Felenessemant s’antr’espruevent.

    Il semble que l’accent se porte sur le deuxième pied du vers par mimétisme avec le vers précédent, nous constaterons cette tendance dans d’autres cas. Dans la même œuvre on rencontre des mots de six syllabes :

    Et vos m’an savrïez6
      mal gré

    si vos recorrocerïez

    et m’en remenacerïez. (vv.

    1687-1688)

    À l’époque de la Renaissance, on se méfie de ces mots ; l’exemple de quelques mots grecs et latins inutilisables en vers à cause de leur structure prosodique a pu influencer cette méfiance.

    lisez l'intégralité de l'essai d'Amédée Schwa dans lovendrin n°14


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  • Voltaire tel qu’en lui-même...

    Les contemporains avaient noté le caractère dogmatique, intolérant et sectaire des Philosophes français et de Voltaire tout particulièrement. Mais Condorcet, en publiant la Correspondance du Maître, l’avait amicalement expurgée de tout ce qui pouvait nuire à son image. Plus récemment, les sérieux auteurs du Dictionnaire général de Voltaire (2003) avaient pris le soin, par des notes euphémiques et des glissando habiles, d’en guider la lecture : une paire d’œillères, pour ainsi dire, était fournie avec. Une lecture objective, un dépouillement des textes et des volumineuses correspondances du XVIIIe, auront eu raison de ces travestissements: avec Voltaire méconnu, le Pr. Xavier Martin signe un «Voltaire mis à nu» aussi inattendu (et pour certains aussi scandaleux) que le fut la sculpture de Jean-Baptiste Pigalle.

    Le Voltaire dépeint ici (colérique, rancunier, hypocrite, jaloux, méprisant, haineux) s’éloigne radicalement du buste ordinaire ; et, s’il est normal de séparer un homme de son œuvre, dans le cas de Voltaire qui eut le rôle d’un donneur de leçons on est fondé à les rapprocher car il apparaît, d’une part, que des défauts fort répandus dans l’humanité atteignent chez lui un seuil pathologique et que, d’autre part, son tempérament est trop en contradiction avec les idées qu’il professa pour qu’on ne puisse pas parler d’hypocrisie. D’autant plus qu’outre les défauts communs Voltaire en cultiva de plus rares, comme celui de dénonciateur ou d’embastilleur. Le Pr. Martin avait dans un précédent ouvrage (L’Homme des droits et l’homme et sa compagne) évoqué le racisme voltairien ; ce racisme se relie très logiquement à sa haine de l’humanité en général, à sa haine de l’homme fait à l’image de Dieu - notion insupportable pour Voltaire.

    On mesure page après page l’ignominie d’un Voltaire souvent monomaniaque ; on finirait pas trouver Rousseau sympathique. C’est assez indiquer le caractère de l’œuvre et de l’homme.

    Xavier Martin, Voltaire méconnu, Aspects cachés de l’humanisme des Lumières (1750-1800), Dominique Martin Morin, septembre 2006, 350 pages, 26 euros.

    Commandez ce livre sur internet:

    http://www.decitre.com/livres/Voltaire-meconnu.aspx/9782856523032

    http://www.librairiecatholique.com/Livres/Litterature/Essais.asp

    http://www.amazon.fr/Voltaire-m%E9connu-lhumanisme-Lumi%E8res-1750-1800/dp/285652303X


    Maurras enfin

    Tous les auteurs passent par une période de purgatoire, mais c’est des enfers qu’il fallait avoir le courage de tirer Maurras. Stéphane Giocanti le fait avec succès avec sa biographie Maurras, Le chaos et l’ordre. Il aborde les questions compromettantes (l’antisémitisme, la Collaboration) avec une hauteur de vue paisible qui fâchera, j’imagine, ceux qu’elles rendent hargneux. Par ailleurs écrire la vie de Maurras nécessitait un solide appétit intellectuel : matériellement, la tâche avait assez d’ampleur pour effrayer les bonnes volontés puisque la vie de Charles Maurras représente soixante-dix années d’activités politiques et littéraires « non-stop ». Cela aussi, l’auteur l’a mené à bien, sans pédantisme aucun, mais de façon vivante; il fallait ce ton pour évoquer un auteur qui, à l’inverse de l’image qu’on pouvait avoir de lui, celle d’un homme tout en matière grise, se révèle bon vivant et grand amoureux.

    Le sous-titre de la biographie « Le chaos et l’ordre » ne doit pas induire au faux sens : pour Maurras l’ordre n’est pas un ordre policier, un ordre sarkozyen lacunaire et d’apparence, mais - le pléonasme est nécessaire - un ordre cosmique ; l’ordre opposé au chaos, c’est la lumière opposée aux ténèbres - une notion d’exigence, d’élévation intellectuelle et spirituelle.

    Stéphane Giocanti, Maurras, Le chaos et l’ordre, Flammarion, septembre 2006, 576 pages, 27 euros.


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  • A contre-courant (Journal 1962-1964)

    1er juillet 1962 – Je viens d’écrire le mot Fin… Mon roman est d’un pessimisme épouvantable. Il illustre ma pensée qu’il n’y a de bonheur total qu’en échappant au monde par le rêve ou la folie. Et le mot d’émilia qui conclut mon roman est à ce titre bouleversant. J’ai sangloté tout au long du passage où Jeanne évoque son fiancé. Enfin j’aimerais qu’on me fît crédit pour tout ce qui est contradiction et foisonnement dans mes pages : cela est destiné à traduire de manière incernable la vérité, la vérité qui est incernable. Je crois que je n’aurais jamais joué aussi bien qu’ici avec le symbole et son approximation - car je lui refuse l’exactitude. évidemment je suis heureux d’avoir écrit cet ouvrage. Je le crois destiné à durer bien des générations.

    Un fragment d’éternité (Journal 1970-1972)

    29 mai 1970 - Aperçu hier, dans un hebdomadaire ou mensuel du style Elle ou Marie-Claire : Le mariage est contre nature. Les imbéciles, ils le remplaceront par quoi ? Car il y a les enfants. Dire « contre nature » ce qui est une institution sans doute immémoriale est du reste ne pas savoir ce qui est « naturel », naturel à l’homme, j’entends. On veut tout ramener au coït et voir en lui la seule finalité de l’homme. Mais alors c’est ne pas se soucier de l’homme naturel, c’est se soucier de l’animal dans la nature, de l’infra-homme, c’est, fût-ce symboliquement, arrêter la création un jour plus tôt. Je crois que je n’ai rien écrit d’aussi juste pour expliquer cette civilisation, que les quelques lignes de La Couleur du Gris où j’associe technocratie et pourrissement. Le technocrate, c’est le Néron moderne, qui gouverne dans le mépris de ceux qu’il endort par la satisfaction qu’il leur procure du pain et des jeux.

    16 juin 1970 – Je songe à ce qui fait un des intérêts les plus grands du journal intime, et d’ailleurs aussi bien pour le lecteur que pour son rédacteur, qui, plus tard, se relit : c’est l’inattendu. Rien qui nécessairement s’enchaîne. Et cela me fait songer que, dans cet ordre, un journal doit être d’autant plus intéressant, parce que plus inattendu en ses notes, que l’auteur vibre en davantage de cantons de la vie. Lui, est le risque unique de monotonie, non le monde qui offre tout. Que le scripteur soit divers, autrement dit : riche, et le journal est sauvé.

    20 août 1970 - Le soir. Je viens de relire les pages qui terminent la scène où Bourgain et le libraire Simon se rencontrent, où Bourgain s’en va sans vouloir entendre son secret, où Despérant survient, si fade, si dérisoire... C’est atroce, mais d’une grandeur désespérée. Le pouvoir, quand même, des mots, quand on sent ! J’en suis tellement remué que je m’arrête, je reporte à demain ma seconde lecture.

    5 mars 1971 - Un silence de murmure, qui tout à coup, appelé comme du fond d’un abîme, emplit les minutes des apparences de la vie. On le voudrait sans fin. Car au-delà, on retombera. On le sait. Cette peur de la chute vertigineuse ! Et qui nécessairement va venir, qu’on reporte, accroché à la paroi des hauteurs, s’y tassant, la pensée tassée avec le corps, capable enfin de confondre précarité et éternité, fragment et tout, chair et monde. Délivrance panique de la pesanteur par elle-même ! Puis l’inexorable précipitation, au fond de la nuit, reins brisés…

    Pour achever ma journée, lecture du Monde, puis poursuite du livre sur les régimes politiques en URSS. Je me soûle de telles lectures. Ai-je raison ? Je ne voudrais aucune lacune dans mon information. Certes, pourquoi, puisque je n’ai jamais l’occasion d’être discuté ? J’ai le sentiment d’engranger des précisions pour rien : d’abord, mon intuition devrait me suffire ; ensuite, la mort annulera ce que j’aurai acquis avant que j’aie eu à m’en servir. Ce n’est pas même planter, ici. C’est entasser de l’or dans une lessiveuse, enterrée, que personne après moi ne pourra trouver. Cependant, quoi faire d’autre, puisque je n’ai plus, au soir, le courage d’écrire, et que je passe ma vie lucide à appréhender (tel que je fus enfant) de ne pas savoir. Alors, apprendre.

    Journal d’un Sculpteur, 1974-1993

    14 mars 1975 - Train de 10 h pour Paris... Que j’en revienne à Jean, à la sculpture. à l’Art. Avec cette majuscule, échelle qui permet de monter de quelques degrés, de gagner quelques degrés au-dessus des boues. Autre échelle de Jacob. Mythe peut-être. Qui en tout cas satisfait ma conscience. Et plus, les poumons. Ce besoin de respirer jusqu’au fond, de se tenir dans les fraîcheurs natives. De vivre.

    - Goethe était entouré des moulages des Grecs.

    24 février 1977 - Trouvé en rentrant de Paris ce billet de Belmondo :

    « Paris le 18 février 1977

    Cher Monsieur,

    J’ai reçu votre lettre qui m’a fait beaucoup de plaisir. Je vous en remercie infiniment. Voua avez raison, notre société est en un état de décadence avancée. La médiocrité triomphe. Heureusement que notre passion pour notre art et notre travail assidu sont une consolation.... »

    les 8 volumes du Journal de Roger Bésus

    sont publiés par les Editions Bertout (Luneray, Seine-Maritime)

    http://www.editionsbertout.fr/

    photos d'oeuvres de Roger Bésus: http://lovendrin.oldiblog.com/?page=photos&idgal=192741


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