• Arménie (art d')

    Au musée du Louvre

    Armenia sacra<o:p></o:p>

    Présent du 24 mars 2007<o:p></o:p>

    <o:p>
    </o:p>
    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Une scène fréquemment peinte et sculptée nous montre Tiridate, roi d’Arménie, avec une tête de sanglier. Ce n’est pas lèse-majesté mais leçon à l’adresse des princes qui persécutent les chrétiens. Tiridate, responsable du martyre de plusieurs vierges, se retrouva métamorphosé en sanglier. Il eut connaissance que seule la libération de Grégoire l’Illuminateur, jeté dans un puits depuis treize ans pour avoir refusé de sacrifier aux dieux païens, lui rendrait son apparence humaine. Il le libéra, avec le résultat espéré. Il alla plus loin en se convertissant et en instituant le christianisme comme religion officielle en 302. Cette foi commune fut le ciment du peuple arménien, dans la région même où Noé s’était échoué longtemps auparavant avec son arche, comme dans l’exil.

    <o:p></o:p>

    L’exposition est richement dotée en manuscrits. Les enluminures présentées ne font pas double emploi avec celles de la BN Richelieu (voir Présent du 17 février), et, avouons-le, elles sont souvent plus intéressantes. L’orfèvrerie sacrée, médiévale et récente (XVIIIe), est aussi une belle démonstration de savoir-faire. Mais les joyaux de l’exposition ne sont pas en or : l’émotion est grande de se retrouver face aux katchkars, ces pierres dressées crucifères, votives ou funéraires, lointaines cousines des croix irlandaises. Intelligemment placées dans les fossés du Louvre médiéval, elles ouvrent la visite en mettant les plus mécréants des visiteurs dans une saine disposition tant elles sont impressionnantes de hiératisme. Richement décorées par registres, parfois de manière asymétrique, elles déclinent entrelacs, palmettes, strigiles autour d’une croix principale à laquelle s’ajoutent souvent deux croix plus petites. De pratique archaïsante, la taille hésite à sortir le volume, pratiquant plutôt l’évidement et le glyphe. Du IXe au XVIIe, on constate peu de variations, si ce n’est qu’à date plus tardive on ose un Christ et des anges. Une phrase dédicatoire est gravée, où la croix est présentée comme l’intercesseur du mort ou de sa famille. Actuellement hélas, la destruction massive de ces croix est une pratique encouragée tant en Turquie qu’en Azerbaïdjan (dans le cimetière de Djougha, près de cinq mille katchkars ont été brisées et jetées au fleuve en 2005).<o:p></o:p>

    Un linteau, quelques stèles et chapiteaux de Dvin, des Ve et VIe siècles, sont représentatifs d’une autre sculpture, celle ornant les bâtiments. Le Christ et un ange d’un chapiteau (ill.) rappellent étrangement certains personnages de Saint-Benoît-sur-Loire, avec leurs bouilles primitives et juvéniles. C’est un air de famille en ce qui concerne la sculpture, mais une réelle parenté dans le domaine architectural : plusieurs maquettes d’églises arméniennes démontrent combien ces édifices préfigurent les masses et articulations de nos églises romanes. La filiation entre les pratiques architecturales orientales et occidentales n’est pas bien déterminée, mais certaine. L’église de Germigny-des-Prés (Loiret), par exemple, s’inspire de la cathédrale d’Etschmiadzin qui date du VIIe siècle, période féconde en construction. Plus tard, aux Xe et XIe siècles, le recul des Arabes, que ce soit en Espagne, en Méditerranée ou en Transcaucasie (là, grâce à la dynastie arménienne des Bagratides), fit baisser le sentiment d’insécurité et favorisa le rétablissement des échanges entre Orient et Occident, au moment où la chrétienté occidentale bâtissait à tout va.<o:p></o:p>

    Deux portes d’église en noyer, l’une du XIIe, l’autre du XVe, rares exemples de sculpture sur bois, montrent la constance d’une pratique qui, pour être peu renouvelée, se garde malgré tout de dégénérer. Les vantaux de la porte de l’église de Mus sont à motifs géométriques typiquement arabes tandis que les dormants sont à rinceaux et bestiaire ; un saint Georges terrassant le dragon est visible. Celle de l’église du monastère de Sevan est toute aussi belle ; on y retrouve Tiridate, dont la mésaventure bénéfique justifie une représentation bicéphale, homme et sanglier.<o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    Armenia sacra,

    jusqu’au 21 mai 2007, Musée du Louvre,<o:p></o:p>

    illustration : Chapiteau de Dvin© Musée d’Histoire de l’Arménie, Erevan<o:p></o:p>


    Tags Tags : ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :