• Bra (Théophile)

    Au musée de la Vie romantique

    Les élucubrations de Théophile<o:p></o:p>

    Présent du 17 mars 2007<o:p></o:p>

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    Personnage hofmannien par sa recherche de l’idéal via l’art et par son assujettissement à une songerie compulsive, Théophile Bra (1797-1863), issu d’une famille qui sculptait depuis trois générations, se forma en atelier puis aux Beaux-Arts. Récompensé par divers prix, il obtint des commandes intéressantes et fut considéré, jeune, comme un des meilleurs espoirs de sa génération. Mais une crise mystique, de 1826 à 1829, ébranla sa raison et porta un coup fatal à l’épanouissement de son talent.

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    Il a consigné dans L’évangile rouge, édité seulement en 2000, l’essentiel de trois années de déraison. Le premier tiers est d’un grand intérêt. On y lit en préambule comment, tout enfant, une hyperesthésie visuelle et auditive lui procura des états seconds : le soleil éblouissant, les bruits et les chants de l’atelier paternel le plongeaient dans une rêverie hypnotique. A cette prédisposition s’ajouta un attrait pour la religion qui, contrecarré par son père républicain, devint au fil du temps une inquiétude envahissante qu’il essaya de calmer par l’entrée dans la franc-maçonnerie, par l’étude des mystiques orientales, des religions antiques, et par une exégèse toute personnelle de la Bible. La crise de 1826 se développa sur ce terrain favorable et alors qu’il était affaibli par divers doutes : interrogations sur la situation de l’artiste dans la société et sur l’avenir de l’art (premier témoignage, précieux, d’un malaise moderne), solitude matrimoniale, son épouse semblant indifférente à ses préoccupations. Les séquelles d’une chute de diligence qui avait provoqué une activité cérébrale intense et déréglée n’arrangeaient rien… « On peut connaître l’univers », lui répétait une voix intérieure, et il tomba très régulièrement en état somnambulique, sorte d’état second, conscient, où il lui semblait ne plus contrôler ses gestes et ses pensées, pendant lequel il traçait des dessins symboliques ou géométriques annotés de phrases énigmatiques parfois incohérentes. Ces produits aberrants d’un esprit malade sont exposés au Musée de la vie romantique (photo).<o:p></o:p>

    Les deux derniers tiers de L’Evangile rouge lassent comme le monologue téléphonique d’une personne à idées fixes. Sa folie l’amène à se considérer comme un privilégié, un élu, à qui Dieu dicte des messages spécifiques et qu’il charge de missions. Le fatras symbolique, gnostique, etc., l’angélisme swedenborgien et le retour à l’androgynie originelle dont il entretient sa future femme (la seconde ; quand elle mourut, persuadé qu’elle allait ressusciter il se rendit au cimetière dans l’attente du phénomène), tout cela est rapidement ennuyeux. Ce personnage délirant reste pourtant sympathique par son honnêteté ; il n’est pas un Sâr Péladan, qui fut un faiseur tout à fait malsain. Il se rend compte des déficiences de sa raison mais elles s’imposent à lui avec une telle force qu’il est contraint d’obéir à son esprit déséquilibré.<o:p></o:p>

    Déséquilibrée et lassante, l’exposition l’est aussi, dans la mesure où Théophile Bra est réduit à ces feuillets étranges. Un seul bronze exposé (le buste de Mme Mention), c’est trop peu pour le sculpteur qu’il fut. Le Nord (Douai, Lille et Valencienne), où il vécut, ne manque pas de Bra. Les Parisiens peuvent chercher ses sculptures à la Madeleine, à Saint-Louis-en-l’Isle, au Père Lachaise, au Val de Grâce… On lui doit aussi un œil-de-bœuf du Louvre, La guerre et la victoire, et une allégorie de l’Infanterie à l’Arc de Triomphe. Honnête sculpture qui ne brille pas par l’invention mais qui, exempte de la sécheresse néo-classique et du pittoresque romantique, a l’assiette qui manqua à l’artiste, lequel revint à la raison mais resta définitivement ébranlé par cette expérience dont le sens, s’il y en avait un, lui échappa toujours.<o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    Pour aller plus loin: Th. Bra sculpteur

    Théophile Bra, un illuminé romantique, jusqu’au 10 juin 2007,<o:p></o:p>

    Musée de la Vie romantique, 16 rue Chaptal, Paris IXe<o:p></o:p>

    illustration : Tout émane au sein de l’absolu © Paris Musées<o:p></o:p>


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