• Enfants modèles


    Au musée de l’Orangerie<o:p></o:p>

    Les enfants modèles<o:p></o:p>

    Présent  du 16 janvier 2010<o:p></o:p>

    Sait-on que le petit Claude posa pour son père, le peintre Raymond Lévi-Strauss ? Une assez médiocre peinture, d’ailleurs. Que le petit Pierre posa lui aussi pour son père, Georges Arditi ? Et le jeune Jean-Marie pour Augustin Rouart ? Ethnologue, comédien ou écrivain, le fils est devenu célèbre, le peintre non. Plus souvent on connaît les enfants de l’artiste par leurs prénoms attachés à des tableaux. <o:p></o:p>

    Dans le passé pictural, l’enfant est en général associé à l’adulte. Rarement est-ce le peintre et son enfant. Le Titien met d’un côté le père et le fils, de l’autre la mère et la fille. Rubens représente son épouse avec un ou deux enfants, mais lui-même n’apparaît pas. Elisabeth Vigée-Lebrun par contre se représente tendrement enlacée à sa fille Brunette (1786, 1789). <o:p></o:p>

    Au XIXe, l’enfant seul, celui de l’artiste, devient sujet de tableau à part entière. La récente exposition Renoir a rappelé combien il peignit ses fils Claude et Jean. L’enfant est objet de tendresse et objet d’étude. La tendresse, dans l’atelier l’enfant la perçoit à peine : les souvenirs d’enfants posant pour un père sont rarement roses. C’est au mieux un pensum, un moment où il faut rester immobile pendant que frères et sœurs jouent, souvent une heure redoutée où le moindre mouvement est susceptible de déclencher la colère paternelle. Lorsque les souvenirs sont bons, reste l’incompréhension de ce qui est en train de se passer. « Ce qui me frappait – écrit J.-M. Rouart – c’était son expression crispée, ses traits tendus comme s’il essayait de déchiffrer sur mon visage une énigme. Que recherchait-il ainsi passionnément à travers moi avec tant de souffrance ? »<o:p></o:p>

    Tous n’ont pas cherché la même chose. La vision de l’enfance reste superficielle chez Maurice Denis. Ses tableaux n’offrent rien d’emballant. Lucien Jonas tente de fixer des moments de bonheurs familiaux, non sans vulgarité. D’autres essayent de fixer la gravité et l’étonnement de l’enfance, que, dit-on, les artistes conservent nécessairement. <o:p></o:p>

    Eugène Durenne peint Mathilde à la toilette (1901) : à sa table, la fillette nous tourne le dos, scène d’intimité toute simple. Inversement Paul Mathey représente son fils Jacques de face, nous regardant ; les adultes sont relégués au second plan (illustration). Odilon Redon choisit un autre angle : le profil de son jeune fils Arï, lui prêtant le caractère d’un ange gothique, sur un fond mi-céleste mi-palpable. C’est le profil aussi que choisit David Emdadian pour représenter sa fille, jolie tête typée (1994), et son petit garçon, perdu dans une grande pièce (1986).<o:p></o:p>

    Cézanne préfère le trois-quart pour son garçon (vers 1880), portrait qui inspire visiblement Gauguin lorsqu’il peint son fils Clovis (vers 1886, toile peu connue appartenant à une collection particulière). De même que les portraits où Mme Vigée-Lebrun s’accroche à sa fille témoignent de la faillite de son mariage, les tableaux de Cézanne et Gauguin révèlent les difficultés familiales. Le fils de Cézanne, illégitime, est longtemps caché ; celui de Gauguin est le seul des enfants qui l’accompagne à Paris après la séparation des époux entre France et Danemark. En voyant telle peinture d’enfant par le Douanier Rousseau, on pense aux six de ses sept enfants décédés en bas âge.<o:p></o:p>

    Le couple Derain eut lui comme épreuve de n’avoir pas d’enfant. Le peintre et son épouse s’occupèrent tendrement de leur nièce, qui vécut longtemps chez eux. Derain l’a prise comme sujet dans de grandes et fortes toiles au début des années trente, période à laquelle Tamara de Lempicka peint Kizette en rose, plus proche de certaines « Enfantines » de Valéry Larbaud : il s’agit d’adolescence et plus d’enfance. <o:p></o:p>

    Ami de Derain, de Paul Belmondo et d’Yves Brayer également présents dans l’exposition, Constant Le Breton (1895-1985), originaire de Saint-Germain-des-Prés en Anjou, a peint son fils « aux bulles de savon » ou « aux soldats de plomb », lointains cousins de quelques Chardin, et surtout une jolie figure de fillette assise, au regard clair, en robe blanche et boléro rouge, sur un fond vert foncé. L’artiste réussit ce tour de force de la rendre à la fois menue et monumentale.<o:p></o:p>

    Charmante exposition, donc, parce qu’il y passe de cette naïveté qui coexiste avec le mystère d’une petite âme. Les commissaires de l’exposition ont choisi, et on les en félicite, de ne pas rompre ce charme par des cataplasmes explicatifs. Les visiteurs sont invités à regarder. Que de richesses dans ces œuvres, richesses et humaines et artistiques ! Elles sont infiniment plus subtiles et plus hautes que le fatras d’installations qui constitua Présumés innocents, dont Enfants modèles est en quelque sorte l’antidote et la réparation.<o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    Les enfants modèles, de Claude Renoir à Pierre Arditi.

    Jusqu’au 8 mars 2010, Musée national de l’Orangerie.<o:p></o:p>

    illustration : Paul Mathey, Enfant et femme dans un intérieur. Musée d'Orsay © Rmn / Hervé Lewandowski<o:p></o:p>


  • Commentaires

    1
    Luca
    Mardi 27 Septembre 2011 à 21:37
    Moi je suis heureux de voter Sarkozy car il est le seul capable de preserver l\'avenir de nos enfants.
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