• Inde classique

    Au Grand Palais

    Grès indiens

     

    Présent du 28 avril 2007

    Vous constaterez en prêtant l’oreille aux commentaires des visiteurs de L’âge d’or de l’Inde classique – L’empire des Gupta combien les Français sont mieux renseignés sur Bouddha et Vishnou que sur le Christ. Ces autophobes seraient surpris et choqués si leur était rappelée l’origine aryenne, pour une part, de ces croyances (via les textes védiques ou le Mahâbhârata). Il est vrai que la civilisation indienne est si éloignée de l’occidentale que nos liens préhistoriques sont difficilement reconnaissables. G. Dumézil, qui a génialement recoupé des récits indiens, romains et scandinaves, était bien placé pour mesurer les écarts existant par exemple entre Rome et l’Inde : les Romains, dit-il en substance, pensaient de manière historique, nationale, pratique et juridique, alors que les Indiens pensaient de manière fabuleuse, cosmique, philosophique et mystique.<o:p></o:p>

    La dynastie Gupta, qui nous occupe ici, a régné brièvement (IVe et Ve siècles), avant que l’empire ne se disloque sous les invasions des Huns. Mais l’art de cette période a perduré jusqu’au Xe, avec des variantes régionales et des évolutions. Les rois Gupta furent des fidèles de Vishnou, l’une des trois divinités de l’hindouisme. La tolérance pour le bouddhisme, le jaïnisme et autres sectes – éparpillement religieux semblable à celui des Eglises protestantes – explique qu’on retrouve dans les œuvres des thèmes propres à diverses tendances ou communs à beaucoup. Un livre paraît dans la collection Gallimard Découverte à l’occasion de cette exposition, écrit par deux responsables du Musée Guimet : L’Âge d’or de l’Inde classique. Bien illustré, clair, il constitue plus qu’une introduction à cette époque, abordant les questions religieuses, historiques et artistiques.<o:p></o:p>

    La première salle est consacrée aux grès rouges de Mathurâ, au sud de Dehli, la seconde aux grès beiges de Sarnath, près de Bénarès. La qualité est inégale. Nous parlions plans au sujet de Praxitèle (Présent du 21 avril). L’art indien présente deux types de taille : l’une qui semble résolument ignorer le travail des plans, l’autre qui les traite avec une grande rigueur.<o:p></o:p>

    Dans le premier cas, le relief est là, mais pas la forme. Ainsi en va-t-il de la statue d’un Tîrthankara jaïn (homme élevé au degré le plus élevé de sa condition) ou de telle déesse fluviale. Le Bouddha recouvert d’un vêtement plissé collant, qu’on nous donne pour merveille, est tout à fait inférieur à des analogues comme l’Apollon de Véies ou le Christ de Vézelay, chez lesquels le même vêtement est dynamique, et le drapé moyen d’expression, suggérant qu’il existe une mystique du pli, totalement absente dans ce Bouddha par défaut d’art et aspect rondouillard. Les reliefs rapportant la vie de Bouddha donnent l’impression que les artistes ont plus été préoccupés par le caractère anecdotique de la narration que par l’expression plastique du sacré. Les peintures des grottes d’Ajantâ, qui relatent elles aussi la vie de Bouddha, et dont de belles reproductions sont présentées à mi-chemin dans l’exposition, sont elles magnifiques et autrement puissantes.<o:p></o:p>

    Cependant – et c’est le deuxième type de taille –, des artistes supérieurs ont pensé quelques statues. Deux Vishnou, l’un sans tête, l’autre coupé au haut des cuisses (photo) sont remarquables : le corps est taillé fermement, les bijoux et la chevelure aussi : ce sont des chefs-d’œuvre. Il en va de même pour plusieurs Bodhisattva (entités de grande bienveillance), à la tête magnifique. La courbe du nez continuée dans celle des arcades sourcilières, celle des yeux effilés, en font des sculptures de haut vol, dont la finesse se retrouve dans de toutes petites têtes paisibles.<o:p></o:p>

    A l’étage, sont présentées des statuettes en alliage cuivreux, des terres cuites qui exploitent surtout des sujets profanes, liés à la mythologie ou au théâtre : scènes du Râmâyana, ou simple jeune fille faisant de la balançoire. Puis viennent les œuvres témoignant des pratiques régionales ou postérieures. Des jambages de portes, des œils-de-bœuf, toujours richement décorés, de qualité là encore inégale. Un motif revient souvent dans cette sculpture murale : le couple d’amoureux, parfois entouré de danseurs et de musiciens, dont la représentation était censée portée bonheur à l’habitation. Nous finirons notre visite sur cette charmante idée.<o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    L’empire des Gupta, jusqu’au 25 juin 2007, Grand Palais.<o:p></o:p>

    illustration : Vishnou (National Museum, New Delhi) © Aditya Arya

    A lire : L’âge d’or de l’Inde classique, A. Okada et Th. Zéphir, Découvertes Gallimard/RMN n°506, 13,50 euros.<o:p></o:p>

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