• René Béhaine

    René Béhaine

    par Xavier Soleil<?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p></o:p>

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    René Béhaine, né à Vervins  (Aisne) le 17 juin 1880 et  mort à Villefranche-sur-mer le 3 janvier 1966, est sans doute l’écrivain  français le plus méconnu du XXe siècle. Depuis près de 50 ans, cette œuvre et son auteur sont tombés dans un oubli profond au point que les dernières générations ignorent jusqu'à leur existence. <o:p></o:p>

    Son œuvre est immense. Comme Balzac, Zola ou Proust, il a voulu décrire la société de son temps sur laquelle il portait un regard aiguisé et surtout un jugement implacable. Car, s’il réclamait, particulièrement en tant qu’écrivain, son indépendance personnelle, il fut très loin d’être, sur le plan social, tenté par l’anarchisme.  Bien au contraire, il dénonçait le fait que plus aucun ordre ne régnât dans la société et en recherchait les causes - c’est peut-être même là l’objet principal de son œuvre . A l’instar de Balzac, il accusa la Révolution Française, fruit et ferment d’un libéralisme effréné et destructeur.<o:p></o:p>

    L’Histoire d’une Société - titre général de l’œuvre, commencée en 1904 et achevée en 1959, comprend 16 volumes Ces seize volumes aux titres étrangement symboliques sont, dans l’ordre : <o:p></o:p>

    Les Nouveaux venus (Charpentier, 1908)<o:p></o:p>

    Les Survivants (Grasset, 1914)<o:p></o:p>

                Si jeunesse savait... (Grasset, 1919)<o:p></o:p>

     « La Conquête de la Vie » (Grasset, 1924)<o:p></o:p>

    L’Enchantement du Feu (Grasset, 1926)<o:p></o:p>

    Avec les yeux de l’Esprit (Grasset, 1928, dans la collection des Cahiers Verts dirigée  par Daniel Halévy), <o:p></o:p>

    Au prix même du Bonheur (Grasset, 1930) <o:p></o:p>

    Dans la foule horrible des hommes (Grasset, 1932, avec des gravures d’E. Bracquemond)<o:p></o:p>

    La Solitude et le Silence (Grasset, 1933)<o:p></o:p>

     Les Signes dans le ciel (Grasset, 1935, dans la collection « Pour mon plaisir »)<o:p></o:p>

    O Peuple infortuné (Grasset, 1936)<o:p></o:p>

    Le Jour de gloire (Mercure de France, 1939)<o:p></o:p>

    Sous le char de Kâli (Laffont, 1947)<o:p></o:p>

    La Moisson des Morts (Editions du Milieu du Monde, 1957)<o:p></o:p>

    L’Aveugle devant son miroir (Editions du Milieu du Monde, 1958)<o:p></o:p>

    Le Seul Amour (Editions du Milieu du Monde, 1959)<o:p></o:p>

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     L’œuvre de René Béhaine fut, entre les deux guerres mondiales, saluée par une partie de la critique. Ainsi Léon Daudet, codirecteur de l’Action Française et grand découvreur de talents, lui consacrait, après la parution d’Avec les Yeux de l’Esprit, un long et élogieux article, recueilli dans le 8e volume de la série Ecrivains et  Artistes, et qui débutait par ces lignes : « Trois noms - je le répète une fois de plus – dominent le roman contemporain, ce roman que l’on dit mourant et qui commence seulement sa vie seconde, celle des interprétations de la vie et de l’âme : Marcel Proust, Bernanos, René Béhaine. » Et un peu plus loin, ces remarques qui montrent une véritable compréhension de cette œuvre originale : « Ce n’est qu’ à la réflexion et comme au second goût, que cet enveloppement de remarques  brûlantes, originales et  vraies exprimées dans un  style réticent, racinien (du Racine en prose) commence à agir, à impressionner, à dominer le lecteur. Alors vous reprendrez ces pages éclairées d’une entre-lueur de crépuscule estival, et vous descendrez en elles avec une impression  de douceur compréhensive et de chatoyante euphorie. Elles s’imposeront à vous, elles vous hanteront, par une espèce de sortilège, à la fois sensible et mental. Elles se  saisiront de votre mémoire. » <o:p></o:p>

    Il fit la connaissance du grand mécène Jacques Guérin, puis, à la fin des années 30, celle de Pierre Guillain de Bénouville, alors camelot du roi, qui devait devenir l’un des chefs de la Résistance intérieure ; l’un et l’autre le soutinrent jusqu’à la fin de sa vie et l’aidèrent à publier ses trois derniers livres.<o:p></o:p>

    Albert Feuillerat (1874-1953), beau-frère de Paul Bourget et Directeur des études romanes à l’Université de Yale, a tracé de René Béhaine, dans le Bulletin des études françaises (Montréal, mars 1942) un portrait admiratif, tant de l’homme que de l’écrivain   dans lequel je relèverai cette appréciation synthétique : « Sa critique de la bourgeoisie déchue s’est épanchée dans une suite de tableaux significatifs, vigoureusement brossés, à la composition desquels ont collaboré un observateur perspicace, un moraliste passionné et un humoriste narquois qui prend plaisir à montrer l’humanité toute nue, dans ses contradictions et ses ridicules - l’ensemble composant une vaste fresque qui complète celle que Proust nous a léguée de l’aristocratie et de la haute bourgeoisie à la même époque. » Faisant justice des imputations d’une critique malveillante, son article est intitulé : Un précurseur de Marcel Proust : René Béhaine. <o:p></o:p>

    Signalons enfin que la première partie de l’œuvre a fait l’objet d’une thèse de Viviane Smith intitulée « la première manière de René Béhaine » (Doctorat d’université, Paris-Sorbonne 1978 ) dont on retiendra la conclusion : « Cet univers romanesque allie de façon déconcertante un personnage central d’une idéologie réactionnaire à des procédés romanesques divers, inventifs et précurseurs. Le climat du texte l’emporte sur le déroulement du récit, ralenti jusqu'à l’immobilisme. Les traces d’un humour corrosif donnent un relief plus aigu aux analyses cruelles. L’auteur s’est risqué à la phrase longue, difficile à lire, qui retient les uns et décourage les autres. Enfin, en creusant le particulier d’une âme, celle de Michel, le romancier rejoint le général, procédé romanesque également précurseur. Le lyrisme de Michel, antihéros qui se veut héroïque, retentit comme la complainte, proférée devant le tribunal du lecteur, de la condition humaine tout entière»<o:p></o:p>

    « Idées réactionnaires… procédés romanesques inventifs et précurseurs… » A l’époque où étaient publiés les romans qui donnèrent lieu à ces appréciations, le grand public se délectait à la lecture des derniers  épigones de Zola : Jules Romains, Duhamel et autres Martin du Gard.<o:p></o:p>

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    Après la guerre, Béhaine a été signalé, le 24 août 1960, aux lecteurs de Carrefour par un article de Maximilien Vox, intitulé « Un romancier de génie, René Béhaine » ; à ceux des Nouvelles Littéraires, le 13 janvier 1966, par un article de Ginette Guitard-Auviste  dont le titre était : « Histoire d’une Injustice » ; dans Ecrits de Paris de mai 1960, Yves Gandon publiait « Explication de René Béhaine » ; enfin, plus récemment, Jean Mabire insérait dans sa série Que lire de National-Hebdo « René Béhaine, la « comédie humaine » d’un siècle tragique ».<o:p></o:p>

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    Comme Balzac, Béhaine a eu, dès sa jeunesse, des rapports difficiles avec la société, à commencer par sa famille. Mais, comme lui, il n’a jamais dévié de sa route, ni de l’objet de son étude et, comme celui-ci sa Comédie Humaine, il a pu mener à son terme sa volumineuse Histoire d’une Société.<o:p></o:p>

    L’objet général, voire unique, de cette œuvre est  la recherche, d’abord implicite, puis, de plus en plus explicite, des conditions d’existence de la civilisation. D’où un lent travail d’approche qui est une longue étude des milieux dans lesquels cette recherche s’exercera. Et déjà commence cette critique à la fois angoissée et impitoyable, non tant d’une société décadente que des lois qui ont déterminé cette décadence à laquelle nul ne peut ni s’opposer, ni survivre. Petit-fils spirituel d’un Bonald, Béhaine rappelle inlassablement les règles d’or qui font l’unité d’une Patrie, d’une province, d’un métier, d’une famille alors que les lois en vigueur depuis la Révolution française n’ont engendré et n’engendreront jamais qu’uniformité et asservissement.<o:p></o:p>

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    Comme Proust, il s’est créé un double qui lui permet tout à la fois de décrire de l’intérieur les milieux dans lesquels lui-même, Catherine, puis leur couple, ont évolué et de juger les coutumes, les partis pris et les préjugés de ces mêmes milieux. Ainsi, cette suite romanesque n’est-elle pas vraiment l’histoire d’une société ; on n’y trouve pas de types sociaux comme dans la Comédie Humaine. C’est, à la vérité, l’histoire morale d’une société, une suite de jugements sur des comportements, une représentation mentale de la vie sociale et de sa moralité. Béhaine ne décrit pas un monde comme Zola, il n’en construit pas un plus réel que la réalité, comme Balzac, ou semi-onirique comme Jouhandeau : il a pour but de « faire l’histoire psychologique de son temps » dont il a cherché à représenter, à travers l’enfance, puis l’adolescence, de Michel et de Catherine, « les deux mouvements si différents de la société française, composée d’une foule sans passé au milieu de laquelle subsistent  quelques îlots d’une humanité devenue différente, comme des bouquets d’arbres dans une plaine déboisée », écrit-il dans la préface de La Conquête de la Vie en 1924.<o:p></o:p>

    C’est dans cette même préface qu’il s’explique sur son style. « La phrase écrite n’est, pour le lecteur ordinaire qu’une transposition à peine modifiée de la phrase parlée. Qu’une idée la gonfle, lui donne de l’ampleur et du poids, la gêne et presque la surprise qu’il en éprouvera lui fait conclure aussitôt qu’il y a là une faute... Mais il en est d’autres dont le suffrage sérieux est le seul qui compte, et c’est à ceux-ci que je veux m’adresser. C’est à ceux qui, le livre ouvert, osent et savent suivre avec patience le développement de la phrase qui s’ajuste et s’accorde à la méditation de leur esprit. Le soir tombe, on relit la page, on se cherche dans ce miroir que vous tend l’expérience et qu’a coulé pour vous, dans la retraite et le silence, un cœur si proche du vôtre, qu’on ne connaîtra jamais... » <o:p></o:p>

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    C’est à chaque épisode, presque à chaque page que l’auteur nous invite à un double saut dans le temps : en effet, au temps implicite de l’écriture s’ajoutent à la fois celui du récit et celui du temps, passé ou futur, évoqué par ce récit. On comprendra mieux cette double démarche à la lecture de la page ci-après dans laquelle Michel raconte une difficile promenade en montagne avec son petit garçon. Il entend tout d’un coup celui-ci pleurer.<o:p></o:p>

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    « Ce désespoir était si inattendu chez ce petit enfant qui ne se plaignait jamais, qu’il semblait que la cause en fût ailleurs et débordât l’instant présent. Peut-être, en effet, l’effort excessif qu’il lui fallait fournir lui avait-il rendu le sentiment de toutes les tristesses de cet autre chemin où, sans ménagement comme sans prudence, son père l’entraînait depuis qu’il était né, et avait-il eu une subite prescience de l’avenir qui l’attendait ? Mais si Michel ne se rendit pas compte des raisons profondes d’une défaillance qu’il attribuait tout simplement à une fatigue passagère, quelque chose en lui, situé au-delà de sa conscience, les avait sans doute perçues, puisque, plus tard, montant seul cette fois, perdu dans le plus affreux des songes, une pente couverte de broussailles, l’image de celle que, vingt ans plus tôt, par un chaud matin d’été, tous deux avaient gravie avec tant de peine côte à côte, devait, comme si l’une expliquait l’autre, reparaître brusquement devant ses yeux, chargée d’un sens secret qu’il découvrirait seulement. »<o:p></o:p>

    Les trois temps sont ici bien marqués : celui du récit lui-même, puis le temps de l’écriture où Michel analyse les causes du chagrin de son fils et, enfin, cet autre temps évoqué dont on arrive à croire - suprême habileté de l’écrivain - qu’il se situe au-delà des deux autres.  Léon Daudet notait : « On dirait qu’il a déjà vécu une première vie, dont il se souvient dans une seconde existence... »  <o:p></o:p>

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    Les deux premiers volumes de l’Histoire d’une Société établissent les bases de l’édifice : Les Survivants, c’est la famille de Laignes, celle de Catherine, prise deux générations plus haut ; Les Nouveaux-venus, celle de Michel, également étudiée dans ses racines. <o:p></o:p>

    L’idée même de cette symétrie est simple et sa mise en œuvre peut sembler facile, mais il ne faut pas perdre de vue que ces évocations rapides, mais précises, préfigurent les principaux traits de caractère de nos deux héros : la ténacité, l’ordre, d’un côté, celui de Michel, l’insouciance et le manque de volonté de l’autre, du côté de Catherine, et qu’elles posent les prémisses d’une dualité, pour ne pas dire d’une lutte dont on n’est même pas sûr qu’elle finisse au terme de cette épopée, puisque l’unité ne peut être trouvée sur cette terre, dans cette vie.<o:p></o:p>

    Lus avec intérêt, on les oublie pourtant bientôt pour s’attacher à l’aventure personnelle des deux héros à la faveur de laquelle Béhaine trouve à la fois son style, son rythme en même temps qu’il développe ses idées personnelles sur le mariage, l’armée, les institutions sociales et les ressorts, souvent secrets, de leur fonctionnement, les conditions de la naissance et du développement de la vie et, en ce qui concerne l’homme, de la civilisation. Et c’est là que, peu à peu, nous le voyons avec admiration rejoindre, tant par l’acuité de sa pénétration psychologique que par la profondeur de ses réflexions générales, la pléiade des grands écrivains de l’époque, un Proust, un Faulkner, un Joyce - et, avant eux, un Balzac, un Melville, un Dostoïevski. <o:p></o:p>

    Léon Daudet, pour le citer encore une fois, écrivait : « A la différence de Proust, et à la ressemblance de Bernanos, Béhaine est synthétique, non analytique, et il procède par tableaux d’ensemble, successifs, d’une vigueur égale à leur simplicité... Il est le peintre des ensembles, des rassemblements de la circonstance, du cœur, de l’esprit. Son dernier ouvrage [il s’agit d’Avec les yeux de l’Esprit], comme les précédents, fourmille de ces inclusions merveilleuses, qui ne sont pas digressives, comme chez Balzac, qui se rapportent en plein au thème central, mais qui donnent de la hauteur, de l’espace et de l’air. »<o:p></o:p>

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    Revenant beaucoup plus tard sur la longue entreprise qu’il avait menée à son terme, René Béhaine pouvait écrire à son ami Sylvain Monod : « J’ai entrepris de relire l’Histoire d’une Société que je n’avais jamais relue. L’impression que j’en ressens est bouleversante… Comment ai-je pu me souvenir de toutes ces images que j’ai un jour réfléchies : car si je dépeins un milieu, une heure, rien n’est inventé. Ce jour-là, il y avait un ciel pur, la pluie tombait, et rien n’est imaginé dans les images que j’en donne… » <o:p></o:p>

    Et un peu plus tard (lettre du 13 août 1963) : « Je relis et recorrige pour la deuxième fois l’Histoire d’une Société, et vous me connaissez assez pour savoir que je n’ai ni orgueil, ni vanité. Mais je me rends compte de l’importance exceptionnelle de cette œuvre qui, sans une édition définitive, peut disparaître. Je ne crois pas, surtout en ce temps où un monde s’écroule, à la durée indéfinie d’une œuvre, qu’elle soit musique, peinture, littérature. Si elle est grande, elle a droit pourtant à un prolongement sans lequel son action serait perdue.<o:p></o:p>

    Ainsi, à la pensée qu’un tel effort aura été inutile et vain, je sombre dans une détresse qui aura été le couronnement d’une vie si tragique… Mon œuvre aurait cependant pu et pourrait avoir son prolongement normal, car, ce qu’aucun critique n’a  vu ou n’a osé voir, ce n’est pas une suite de romans, ce sont les mémoires exacts d’un temps… »<o:p></o:p>

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    René Béhaine est mort en 1966, deux ans avant une nouvelle révolution qui préluda à une inversion des valeurs sans précédent, semble-t-il, dans l’histoire de l’humanité, mais préparée par une série de reniements dont peu d’esprits avaient mesuré les conséquences et qui obéissaient à ce plan du Mal dont parle Béhaine à plusieurs reprises, en en désignant presque nommément les auteurs.<o:p></o:p>

    Pour bien connaître sa pensée, il faut lire, dans les derniers volumes, les pages que Béhaine avait, malgré les pressions, et au risque de n’être pas édité, refusé de supprimer, - celles relatives à la Révolution française, à la démocratie, à la Révolution russe, à l’Action Française, au procès de Léon Daudet après l’assassinat de son fils Philippe (procès auquel il avait assisté), au Front populaire, à la « Libération ». Quelque puissants que soient les censeurs du jour, ces pages et quelques autres ne peuvent être arrachées d’une œuvre à l’intelligence de laquelle elles sont profondément nécessaires, car, d’une part elles font partie du témoignage que l’écrivain a voulu porter sur la société au sein de laquelle il a vécu ainsi que sur les causes de son irrémédiable déchéance, mais, d’autre part, elles forment le nécessaire contrepoint de ces pages magistrales où il rappelle la nécessité de la Monarchie capétienne, celle de l’aristocratie ainsi que l’irrésistible déclin d’un peuple qui, conduit par de mauvais bergers, tourne le dos à des valeurs qu’il considère comme vitales.<o:p></o:p>

    On comprendra aisément comment un tel esprit, doué de telles qualités, a pu, après avoir été reconnu par ses pairs dans la période de relative liberté d’esprit que furent les années d’avant-guerre, être totalement rayé du paysage intellectuel français à l’avènement de la démocratie totalitaire qui a suivi les années 1939-1945. <o:p></o:p>

    Toutefois, il demeurait désespéré à la pensée que son œuvre, dont il avait pu mener à bien la correction et qu’il considérait comme un monument de l’esprit humain, mais aussi comme un témoignage capital sur la société de son temps, ne serait pas rééditée et sombrerait dans l’oubli. L’expérience qu’il avait faite aurait été inutile et les vérités qu’il avait contribué à dégager perdues pour une humanité à laquelle même les progrès techniques les plus extraordinaires ne permettraient pas d’échapper à une barbarie désormais inéluctable. « Même si le pire devait arriver... » pensait Maurras, - pour Béhaine, le pire était désormais une certitude.<o:p></o:p>

    Comme celle de Maurras, son oeuvre est un rempart contre la bêtise et la lâcheté. Et, s’il est vrai, comme l’écrit Kléber Haedens dans la préface de son Histoire de la Littérature française, qu’ « un seul lecteur peut rendre un auteur plus important que cent mille », nous souhaitons comme il le désirait ardemment et comme il ne lui parût pas tout à fait impossible que cela arrivât un jour, que l’Histoire d’une Société atteigne enfin le public qu’elle mérite et soit reconnue par lui comme l’un des grands classiques du 20e siècle.<o:p></o:p>

    Elle est aussi, et peut-être surtout, un témoignage, - et notre lecture de ce témoignage est aggravée de tout le poids de celui qu’à notre tour nous pouvons porter - que, de façon irrémédiable, la pesanteur l’a emporté sur la grâce. Car, il ne s’agit même plus de la disparition d’une civilisation, mais du fait que la voie dans laquelle s’est engagée l’humanité tout entière interdit la naissance ou la renaissance de toute civilisation.<o:p></o:p>

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    Extrait de l’introduction aux Pages choisies de l’Histoire d’une Société

    présentées par Xavier Soleil, avec une lettre de Michel Déon de l’Académie Française

    (Editions Nivoit 5 rue de Berry 36250 Niherne, juin 2006 – prix : 28 euros, port compris ).<o:p></o:p>

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