• Salon de l'Agriculture

    L’agriculture face à l’associatif

    Le collectif France Nature Environnement, peu avant l’ouverture du Salon de l’Agriculture, a lancé une campagne. Une campagne ni publicitaire, ni bucolique, plutôt une campagne guerrière, dirigée contre l’élevage industriel mais visant aussi le monde agricole en général, au sujet des algues vertes, du danger lié aux OGM et aux pesticides.

    Une affiche a particulièrement déplu, celle qui montre un homme s’apprêtant à se suicider, un épi de maïs OGM sur la tempe. L’agriculture est une catégorie socio-professionnelle particulièrement touchée par le suicide (taux trois fois supérieur à celui des cadres), donnée que FNE ne peut ignorer, et qui rend l’allusion particulièrement ignoble.

    Qui est FNE pour s’instaurer en donneur de leçons ? Un « mouvement citoyen » d’associations et de fédérations d’associations, et de collectifs d’associations, soit au total un rassemblement de 3 000 « assoç ». Trois mille ! Le chiffre rappelle combien le marché de l’associatif, combiné avec celui de la défense de l’environnement, est juteux. Bien entendu, les idées sont désintéressées. FNE se présente comme « une association sans but lucratif, indépendante de toute entreprise, collectivité, organisation politique ou religieuse. »

    Indépendante ? En réalité elle vit grâce aux subventions du ministère de l’Ecologie et du Développement durable, à celles de l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie qui dépend en partie de ce ministère. En 2009, les aides de l’Etat représentaient 57 % de son budget de fonctionnement. Cet argent public sert aujourd’hui attaquer une filière déjà gravement éprouvée.

    L’altermondialisme à l’œuvre

    Dans la nébuleuse associative que prend FNE sous sa houlette, figurent des associations locales légitimes comme le Groupe ornithologique normand ou l’association Eaux et Rivières de Bretagne. Celle-ci s’est désolidarisée de la campagne agressive, en particulier de l’affiche concernant les algues vertes. France Nature Environnement n’avait pas cru bon de prévenir tous ses cotisants du sale coup médiatique qu’elle préparait. Eaux et Rivière de Bretagne « regrette profondément cette absence de concertation préalable ». Directement concernée par le problème des algues vertes, elle voit son travail ruiné par l’agressivité de FNE, alors qu’il faudrait « éviter toute forme de provocation qui conduit inévitablement à des surenchères ».

    A côté des associations qu’on peut estimer sincères – et manipulées –, il en est d’autres d’inspiration clairement altermondialiste, tout comme certaines des associations « amies », par exemple Nature et Progrès, et encore l’emblématique Greenpeace.

    L’esprit altermondialiste implique la promotion du commerce équitable. Ce commerce consiste à rétribuer justement le petit producteur exotique, à le protéger des multinationales occidentales, afin de lui procurer une vie décente. En théorie, évidemment, car ce n’est pas parce que c’est marqué sur le paquet que cela est aisé à vérifier. En pratique, l’idée généreuse ne vaut pas pour le petit producteur français, prisonnier d’un système de marges avant et arrière qui aboutit à vendre des produits en grande surface à des prix inférieurs au prix de revient. France Nature Environnement n’a aucune intention de lutter pour l’instauration d’une équité commerciale en France. C’est que le petit paysan exotique, humble rescapé de la colonisation, est supposé produire selon une méthode ancestrale en harmonie avec la Terre ; tandis que le petit paysan français, ex-colon par son histoire, pèche intensivement, par action et par pollution.

    Subventions

    Cette façon de produire, les agriculteurs n’en sont que partiellement responsables. La politique agricole commune (PAC) en un demi-siècle a démantelé l’agriculture française. Les quotas, les planifications, les subventions directes et indirectes… l’ont tuée.

    France Nature Environnement, face aux réactions indignées, a précisé sa position. Pas d’« objectif de rupture avec le monde agricole », elle « entend poursuivre le dialogue engagé avec les représentants d’une profession qu’elle ne veut pas stigmatiser » et « a parfaitement conscience de la détresse économique à laquelle est confronté un grand nombre d’agriculteurs ». Pourquoi cet adoucissement soudain ? C’est que les subventions, si elles ont tué l’agriculture, les associations en vivent, et plutôt bien. Elles en ont besoin pour mener leurs actions subversives.

    Martin Schwa

    Article extrait du n° 7292
    du Mercredi 23 février 2011

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