Des trois Mad Max, le moins bon, et même le mauvais, est le troisième (Au-delà du Dôme du to
nnerre, 1985). Il pêche par un manque patent dunité de lieu et de narration. Au lieu de rester à Barter Town, embryon urbain de lère post-atomique (cette idée même nest pas approfondie), le spectateur est baladé contre son gré. Les idées trop nombreuses se nuisent. La confrontation Tina Turner Mel Gibson, qui eût pu être danthologie, tourne platement. Et la poursuite finale nest quun calque de la poursuite « mythique » du Mad Max 2.Le contexte du premier Mad Max (1979) est volontairement imprécis. Dans une société déliquescente, quelques flics, dont les bureaux sont des locaux délabrés ça sent le budget en chute libre , tentent de faire régner lordre sur les routes où des motards en bande terrorisent, violent, tuent, tandis que lautorité sexprime, désincarnée, par la voix dun haut-parleur, et que les hommes de loi sappliquent au nom du droit à faire libérer les motards criminels. Sy dessinent des personnages et des situations qui seront développés avec succès dans le 2. Une ambiance est créée. La transformation de Max Rockatansky (joué, faut-il le rappeler, par Mel Gibson), de gentil époux et bon « intercepteur » (flic de la route) en justicier implacable, suite au meurtre de sa femme et de son fils, est fort bien menée.
Mad Max 2
(1981) est un film magistral. « En lan 4000, une gigantesque guerre du pétrole a dévasté la terre, entraînant la disparition presque totale des réserves mondiales. Les derniers survivants, rassemblés en hordes, saffrontent pour semparer des derniers barils » Car une goutte de pétrole est une chance de survie pour fuir, se défendre, ou acquérir quelque chose via le troc. La civilisation a disparu. Agrégats dêtres humains quun chef mène, les deux bandes qui saffrontent dans le film, lutte dans laquelle Max va se trouver pris, sont peu reluisantes : lune est résolument nuisible, trouvant son plaisir dans le mal et la violence ; lautre est plus paisible, avec les dangers que cela comporte : tendance à croire que les autres sont bons aussi, survivance de linstinct parlementaire à donner son avis et discutailler faiblesses évidentes par rapport à la meute adverse. Tout cela dans le décor du désert australien, achevant la liste des trois unités : daction, de temps, de lieu.Cette vision dun état de lhumanité retourné à la barbarie est la grande originalité des Mad Max. Quand les romans et films danticipation imaginent un avenir terrifiant, déshumanisé par les ordinateurs et les robots (le Pr. V. Fiumefreddo, lui, limagine terrifiant par la facilité quont ces ordinateurs et ces robots à tomber en panne, la nuance est intéressante), Mad Max nous présente un monde trop-humanisé, à savoir bestial et barbare, où subsistent des machines non pas intelligentes mais mécaniques. Le monde futur ne serait pas un monde étatisé, mais un monde soumis à la loi du plus fort, qui se trouve être dans un premier temps le plus cruel.
Situé dans le temps sans précision, ou de façon lointaine, lunivers décrit dans Mad Max est imminent parce que possible. Arrivent ouragan et inondations sur la Nouvelle-Orléans, et on voit émerger des hordes qui pillent et tuent. La difficulté des Américains, en septembre, à y rétablir lordre fit sourire les Français. Voilà quen novembre se produisent chez nous des faits au moins aussi graves sans que les autorités aient lexcuse dun phénomène climatique soudain et imprévisible. Nos sociétés ne sont pas grand chose
Kwasi Modo