• 1500 (I)

     

    Au Grand Palais<o:p></o:p>

    France 1500 (I)<o:p></o:p>

    Présent du 20 novembre 2010<o:p></o:p>

    France 1500 ! Intitulé lapidaire pour désigner un foisonnement artistique remarquable mais que le parcours de l’exposition ne rend pas lisible, au contraire. Le morcellement des écoles artistiques entre 1450 et 1530 réclamait une concision thématique et non une fragmentation supplémentaire.<o:p></o:p>

    Au XVe siècle, les arts se répartissent en aires auliques : autour du duc de Bourgogne, qui soutient les arts flamands, autour du roi René qui emploie un Flamand (Barthélémy van Eyck), des Picards (Nicolas Froment, Enguerrand Quarton), deux Italiens (Laurana, Pietro da Milano), des peintres du val de Loire (Georges Trubert) ; en Provence où l’installation de la papauté a constitué des foyers artistiques, et où le roi René finit sa vie. Paris, malmené par la politique, est désormais secondaire. L’accaparement royal, avec et après Louis XI, ne fait pas cesser la circulation des artistes, qui suivent leurs protecteurs en fonction des charges. La famille d’Amboise, aux alentours de 1500, compte un archevêque, deux évêques, un abbé, un gouverneur d’Italie… tous mécènes, s’adressant autant aux artistes locaux qu’aux artistes plus nationaux ou étrangers.<o:p></o:p>

    Le quinzième siècle a ceci de satisfaisant que les talents ont de plus en plus un nom. Les œuvres s’incarnent, même si l’histoire de l’art est encore tributaire de « Maître de… ». C’est à ces noms que nous nous attacherons, en délaissant le hachis chrono-thématique de l’exposition – et en mettant de côté les sculpteurs, pour la semaine prochaine.<o:p></o:p>

    Les génies du XVe siècle ont nom Enguerrand Quarton, Nicolas Froment, Jean Fouquet. Ce dernier, grand harmoniste, grand « formel ». Il signe le premier autoportrait français : un médaillon peint à l’or. Le regard fermement posé sur le monde, dans la simplicité du face-à-face, mais aussi le regard inquiet de l’artiste scrutant le divorce, ici-bas, parfois, de l’intelligence et de la beauté, du beau et du vrai, pour les raccorder dans ses peintures.<o:p></o:p>

    Ces trois peintres n’ont pas la descendance qu’ils méritent.<o:p></o:p>

    Les enluminures de Jean Bourdichon, un élève de Fouquet, sont ambitieuses : il se lance dans les effets de nuit (Nativité, arrestation du Christ) mais Barthélémy d’Eyck, auparavant, a fait mieux. Bourdichon manque de nerf.<o:p></o:p>

    Jean Poyer enlumine les Heures d’Henri VIII. La Vierge en majesté est remarquable par son volume ; elle s’inscrit dans une niche post-gothique, ou pré-Renaissance, comme on voudra. Dans les Heures de Marie d’Angleterre, des putti en bas de page témoignent d’un goût italianisant. Le repas chez Simon est une grande huile sur bois, non dépourvue de sens religieux, auquel s’ajoute un don d’observation qui se manifeste dans la rusticité du buveur de soupe attablé, du convive qui, en bout, se balance sur son petit banc.<o:p></o:p>

    Jean Perréal est l’un des artistes qui auront contribué à répandre l’italianisme, par son art du petit portrait en buste, par son entregent entre artistes et commanditaires : il est à Lyon, en Italie, en Angleterre… Citons encore Jean Colombe (peintre de batailles avant la lettre), Jean Pichore (une charmante Ariane, belle Italienne découplée : page tirée des Héroïdes), Robinet Testard (au style dur, qui blesse l’œil).<o:p></o:p>

    C’est à deux peintres venus du Nord qu’il faut demander du caractère : Josse Lieferinxe et Jean Hey.<o:p></o:p>

    Lieferinxe s’est fixé en Provence. Son œuvre dispersée çà et là est impossible à rassembler. On voit ici deux panneaux d’un retable consacré à saint Sébastien. Saint Sébastien soigné par sainte Irène est un tableau particulièrement inspiré, la qualité des drapés sert la noblesse des attitudes. La hachure n’est pas impersonnelle : elle est déjà une touche qui exprime la forme et la personnalité de l’artiste.<o:p></o:p>

    Jean Hey, au service des Bourbons, a travaillé à Moulins, à Lyon. Pierre II de Bourbon, son épouse Anne (fille de Louis XI), leur fille Suzanne (illustration, vers 1492), ont été portraiturés dans des retables, comme plus tôt le cardinal Rolin (Nativité). Femmes et enfants témoignent de l’influence du Brugeois Hugo van der Goes. Les donateurs entrent de plain-pied dans la scène religieuse dont ils sont témoins, parrainés par leur saint patron. Les harmonies froides et claires sont une transposition, à l’huile sur bois, du monde des miniatures.<o:p></o:p>

    Il serait injuste d’omettre le « Maître de saint Gilles », qui ne mérite pas l’anonymat. Le panneau qui raconte la découverte, par les chasseurs, de l’ermite blessé d’un flèche alors qu’il protégeait sa fidèle biche prouve la fraîcheur de l’huile, quand on y prend garde ; la fraîcheur de l’âme du peintre, son talent : plus à l’aise à peindre la nature que l’architecture (La messe de saint Gilles), il donne à la scène une atmosphère qui n’est que pureté.<o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    (à suivre)<o:p></o:p>

    France 1500, entre Moyen Age et Renaissance.

    Jusqu’au 10 janvier 2011, Galerie nationale du Grand Palais.

    illustration : Jean Hey, Suzanne de Bourbon (musée du Louvre) © Rmn/Gérard Blot<o:p></o:p>


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