• Pascal.

    - à New York, une sculpture en chocolat représentant le Christ en croix («My sweet Lord», mon doux Seigneur) a déclenché la réaction légitime d’une association catholique. Le sculpteur Cosimo Cavallero «voulait susciter une méditation sur la Semaine sainte», selon le directeur artistique de la galerie. «Ils n’oseraient jamais faire une chose pareille avec le prophète Mahomet nu, ses parties génitales exposées pendant le ramadan», a rétorqué l’association.

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  • Urbain.

    - La «Nuit vitaminée» du 26 mai prochain, organisée par le «Service Jeunes du diocèse d’Angers» s’annonce chaude et tendance (voir ci-contre). On saura enfin ce qu’il y a de plus mou, un concert de reggae ou une catéchèse de Mgr Brugiès? Quoi qu’il en soit, cette soirée paraîtra sûrement fade en comparaison de celle de la Gare du Nord le 28 mars dernier, où les jeunes s’en sont donnés à coeur joie.


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  • L’inquiétude des artistes n’est pas réductible au Romantisme: elle perdure... Le sentiment de l’inutilité de leur travail, et, celui-ci comptant plus que tout, de leur personne même, en a mené certains au geste irrémédiable. Amédée Schwa évoque ici le romancier John K. Toole, en écho à Théophile Bra, à la façon d’une

    vie imaginaire de Marcel Schwob. - La Rédaction.

    L’œuvre en vain

    On fait des affaires ou on fait des sales vies.

    Shapiron fils

    «Parce qu’il se croyait un écrivain raté, John K. Toole se suicida.» Je pense quant à moi qu’il se suicida parce qu’il savait n’être pas un raté. Le manuscrit de la Conjuration, dans son tiroir, le lui prouvait suffisamment. Auguste Tiroir, l’obscur ébéniste du Fbg-St-Antoine qui inventa l’élément rétractable auquel on donna son nom, s’il perfectionna le meuble, porta un coup en douce à la littérature. Mais on ne peut juger d’une chose d’après le mésusage qu’en font certains.

    Si Toole n’était pas un raté, les éditeurs qu’il contacta en étaient, eux, et des pires, avec pignon sur la rue. Ne pas les accabler : ils agissaient selon leur conscience quand ils répondaient à Mr Toole : «Votre roman ne rentre pas dans notre ligne éditoriale» ou «Nous n’acceptons les manuscrits que d’auteurs déjà publiés». Y a-t-il un objet plus beau qu’un éditeur accomplissant son devoir d’état ? John K. Toole n’avait pas fait le sien en écrivant un roman sans médiocrité. Tout cela est déjà dans un Conte cruel dont l’épigraphe est cette «devise moderne» : Surtout, pas de génie ! – voyez l’épigraphe de la Conjuration.

    D’éditeur en éditeur, de réponse négative en réponse méprisante, Toole ressentit du découragement. Ses proches eurent la réaction la plus attendue : comme il se décourageait vite, pour un petit refus supplémentaire ! Il est si difficile d’être édité, de nos jours ! Et Toole se disait qu’en effet de nos jours il est si difficile… lorsque passant devant la devanture d’un libraire surchargée de livres il comprit que le problème était ailleurs : non dans la trame de son roman, mais dans les fibres dont elle était tissue. Il n’y avait pas de solution. Cela rendait encore plus cuisants les commentaires aveugles qu’on pouvait faire au sujet de son «découragement».

    Des gens lui dirent qu’il s’y prenait mal – ce serait donc toujours de sa faute – et l’engagèrent à se faire recommander par un tiers auprès d’un éditeur ; moyen infaillible, était-il précisé. Cela ne donna pas plus de résultat. Ses amis l’incitèrent à écrire un second roman pour que le premier ne l’obnubilât point et lui prônèrent la résignation.

    Admirable attitude que la résignation et plus admirable encore l’aisance avec laquelle elle est recommandée aux artistes. Ils sont priés de se reporter à la vie terrible d’Untel, ou à la misère de Machin-Chose, qui, nonobstant, ont laissé une œuvre si extraordinaire. Ainsi se trouvent données en exemple des vies entachées de tentatives de suicides ou abrégées par ce moyen. Situation analogue à celle d’un baigneur en train de se noyer dans un fleuve de Cilicie, à qui quelqu’un crierait depuis la rive : «Je ne peux rien faire pour vous, mais sachez qu’à cet endroit, en 1190, se noya le grand Frédéric Barberousse.» Ou bien, sans boire si loin la tasse : «Dans cet estuaire large et majestueux, dont, je crois, vous ne mesurez pas toute la beauté, s’est noyée Léopoldine Hugo ! Ne gigotez pas tant, vous allez faire fuir le poisson.»

    Non seulement Toole ne se résigna pas, mais il refusa d’entreprendre la rédaction d’un autre livre. Ses proches persistèrent à le croire enfoncé dans le découragement, sans énergie, alors qu’il sentait ses forces intactes mais avait le sentiment de la complète inutilité de tout effort. Cette énergie créatrice qui, si elle restait inemployée, risquait de le dévorer, il la convertit en énergie sexuelle et s’en donna à cœur joie avec les gentes dames du Mississipi. Elles seules lui reconnurent du talent et, par les consolations qu’elles lui procurèrent, retardèrent sa mort. Cependant, entre deux femmes, La Conjuration des Imbéciles lui pesait sur la conscience comme si elle avait été une faute, et plus que tous ses péchés réunis.

    Quand il eut constaté que la Roue de Fortune, concept pour lequel son héros Ignatius, connaisseur de la pensée médiévale, montre tant d’intérêt et de respect, ne tournerait pas et le laisserait au plus bas, il relia le pot d’échappement de sa voiture à l’intérieur de l’habitacle par un tuyau d’arrosage, s’enferma dans le véhicule et mit le contact. L’odieux et le sordide de ces préparatifs ne m’échappent pas ; mais songeons que le degré qu’ils atteignent en cette évocation n’est rien comparé à ce que dut vivre Toole les dernières années.

    Comme pour donner raison aux Philistins prêchant patience et résignation, la mort de Toole ne fut pas vaine : son roman obtint en 1981 le Prix Pulitzer à titre postume et un vif succès. De là-haut, l’auteur n’eut pas à en sourire, fût-ce amèrement, étant là où «les pourquoi et les comment ne signifient plus rien du tout.» Surtout, les éditeurs méditèrent sur son destin et leurs pratiques. Le drame de John K. Toole, s’accorde-t-on à penser, ne saurait se reproduire.

    Amédée Schwa


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  • Théophile Bra intra muros & in situ

    L'exposition, au Musée de la Vie romantique (jusqu’au 10 juin), des dessins hallucinés de Théophile Bra est bancale, car le sculpteur est réduit aux images nées de ses délires. J’ai eu l’occasion de le regretter dans un compte-rendu (Présent du 17 mars dernier). Comme les regrets sont sources d’insomnie et que le sommeil est précieux, je suis parti à la recherche des œuvres de Th. Bra intra muros.

    La tâche n’est pas aisée. Les listes sont imparfaites, et même en les croisant (celle de M.-Cl. Sabouret donnée dans le dossier de presse et celle de Jacques de Caso dans l’édition de L’évangile rouge) on n’obtient pas l’exhaustif ; de plus on se heurte aux aléas du réel - telle sculpture déplacée, disparue, continue d’être mentionnée sans rectification-, à la difficulté de trouver où exactement se situe la sculpture qu’on cherche. Voici le résultat de ce jeu de piste que j’ai mené pour vous. (Je suis l’ordre chronologique.)

    1822. – Allégorie de l’Infanterie, pierre, Arc de triomphe de l’étoile (écoinçons de l’arc, petit côté, face à l’avenue de Wagram). (photos 4, 5 & 6)

    La Guerre et la Victoire,

    pierre, Palais du Louvre, cour carrée, œil-de-bœuf à l’angle nord-ouest. (photos 1, 2 & 3) Les œils-de-bœuf de cette partie n’ont été sculptées qu’au XIXe, par divers artistes. Tous s’inspirent des allégories sculptées par Jean Goujon dans la partie ancienne de la cour carrée, d’où ces plissés caractéristiques.

    1823. – Saint Pierre et saint Paul, église Saint-Louis en l’Isle, chœur. (photos 7, 8 & 9) On appréciera la prestance de saint Pierre et l’effet de masse du drapé, en particulier de dos et de côté par le déambulatoire.

    1826. – Buste du Dr Béclard, bronze, Père Lachaise, division 8. (photo 12)

    1831. – Buste de Benjamin Constant, bronze, Père Lachaise, division 29. (photo 11) Th. Bra a bien connu B. Constant ; le personnage, plein de morgue, n’est pas flatté. La même année, Th. Bra réalisa de lui une statue en pied (musée de la Chartreuse, Douai).

    1835 (?). – Monument au docteur Broussais, bronze signalé (par M. Cl. Sabouret) dans la chapelle de l’Hôpital du Val-de-Grâce. En réalité l’œuvre est située dans l’école du Val-de-Grâce et n’est pas accessible au public; le bronze est daté de 1840. On y retrouve l’aspect massif et vigoureux constaté dans le Saint-Pierre. (photo 14)

    1836. – Sainte Amélie, marbre, église La Madeleine, autel latéral est. éclairée de façon déplorable, en contre-plongée, elle prend un air fantomatique qui ne sied pas à une reine sainte. Que fabrique la fabrique ?

    1842. – Ange gardien, pierre, église La Madeleine, extrémité nord du péristyle ouest. (photos 10 & 13) Cette sculpture a un air gracile qui surprend de la part de Th. Bra.

    Revenons à L’évangile rouge. Intéressante est l’inquiétude – brièvement mentionnée – relative à la situation de l’art et de l’artiste dans la société du XIXe. Après avoir énuméré les causes qui allaient provoquer sa crise, sur lesquelles je ne reviens pas, il continue : «à cela venaient se joindre des dégoûts pour mon art dont je n’entrevoyais pas l’utilité présente ; en effet, de nos jours les beaux-arts ne sont plus guère que des professions industrielles où chacun espère trouver les occasions de faire fortune» (p.35) ; «je fus un moment de chercher une autre profession. Je venais d’achever des travaux presque nuls sous l’intérêt moral ; j’étais fatigué et me préparais cependant à entreprendre l’image du Christ ; et passant en revue les fonctions de l’art chez les différents peuples, […] j’en conclus défavorablement pour mon siècle ; là où l’art statuaire ne peut pas s’exercer dans la haute région du sentiment religieux, il ne peut y avoir ni grandeur ni valeur» (p. 43). Et de conclure : «je n’ai que faire à façonner des figures qui ne me vaudront du public que la plus froide indifférence.» (ibid.)

    Il s’agit là du premier indice d’un mal-être qui va se répandre et demeure jusqu’à aujourd’hui : nulle raison qu’il disparaisse tant que, sans statut social, l’artiste sent peser sur lui le sentiment de son inutilité. Henri Charlier, abordant la question dans Couperin, reproche aux Romantiques une complaisance pour leur mal-être et une vision erronée de la vocation artistique : «On s’est habitué de nos jours à considérer les dons artistiques comme tout à fait exceptionnels et le romantisme les a tenus comme une fatalité malheureuse s’abattant sur un pauvre homme.» (Chap. II) Il faudra un jour cesser d’accabler les Romantiques. Il est clair que leur malaise sur ce point précis de la position de l’artiste dans la société était légitime. Il était normal qu’ils en vinssent à considérer le talent comme une malédiction à partir du moment que ce talent était considéré comme asocial. C’est même plutôt sain, et signe qu’ils ne souhaitaient pas autre chose que leur inclusion dans la vie sociale. Plus malsaine est l’habitude acquise de considérer comme normale une situation fausse.

    Samuel

    Retrouvez toutes nos photos

    des oeuvres de Théophile Bra

    dans lovendrin n°17.


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  • En lisant les Carnets du Cardinal Baudrillart,

    par Xavier Soleil

    Année 1932 - Le Cardinal Baudrillart n’était pas royaliste, encore moins maurrassien, mais c’est sous sa plume – et non sous celle de Léon Daudet – que l’on trouve ces lignes : « Le parlementarisme est de plus en plus répugnant » (27 février 1932). C’est lui – et non Jacques Bainville – qui écrit, au cours du même mois de 1932 : « Quelle indignation dans le monde si, en France, un aventurier étranger au pays en arrivait à mobiliser tout le peuple et à se faire naturaliser pour être élu chef de l’état, avec un programme ultra-nationaliste et belliqueux ? C’est ce qu’on accepte de l’Allemagne. Quelle folie ce fut d’avoir, à la paix, consolidé l’œuvre de Bismarck ? » (26 février).

    La mort de Briand, ce pape du pacifisme ; ses obsèques religieuses... « Il n’était pas révolté à la manière de ceux qui appartiennent à l’Action française. La comparaison s’imposera tout de même...» et, cerise sur le gâteau : « Le ministre de l’Instruction publique prescrit à tous les établissements d’enseignement primaire et secondaire de consacrer samedi toute une classe à célébrer la politique pacifique de Briand et ensuite, à partir de 10 heures, de mettre tous les élèves en congé. » (8 et 9 mars).

    Le Liban, déjà : « Réunion chez les Maronites. Mgr Feghali, M. Ayoub, etc., sont très préoccupés de la prochaine élection à la présidence de la république libanaise. Il y a 45 électeurs, les députés. Les candidats catholiques sont si nombreux et si acharnés les uns contre les autres qu’ils risquent fort de faire passer un musulman. Celui-ci se tournerait vers la Syrie et la Syrie regarde vers la Mecque… » (18 avril)

    Et ce constat désabusé, le 20 avril 1932

     : « Déficit dans le rendement des impôts ; trop faible excédent de naissances en France pour l’année 1931. La tragi-comédie du désarmement se poursuit à Genève, sans autre but que d’arriver à désarmer la France et à l’isoler. »

    « Au nom de la mystique pacifiste, il faut non seulement cacher la vérité, mais la haïr. Le sinistre et stupide Francisque Gay invite dans l’Aube ses démocrates-chrétiens, les uns à se désister et les autres à voter en faveur des radicaux, afin de faire triompher la politique briandiste. »

    « Sed novam aedem ab impiis diu profanatam, dein a Ludovico rege XVIII Patronae Parisiorum restitutam, iterum Christi hostes mortuis suis dedicaverunt. » (extrait du Bréviaire parisien pour la fête de sainte Geneviève). Traduction : le nouvel édifice longtemps profané par les impies, puis restitué par le roi Louis XVIII à la protectrice des Parisiens, les ennemis du Christ l’ont de nouveau destiné à leurs morts.

    « Un grand Français, grand colonial, est mort, le général Archinard. » (9 mai)

    Et si le Cardinal Baudrillart était royaliste – et même maurrassien, à son corps défendant bien entendu ?

    « Heureuse la France, écrit-il le 31 juillet 1932, si, après la guerre de 1870, elle avait rétabli une monarchie, au lieu de sombrer dans une démocratie de forme républicaine où les intérêts particuliers étouffent l’intérêt général ! Quand on compare l’œuvre de redressement national et de rénovation économique accomplie par Mussolini en Italie, sous le couvert de son roi, avec l’impuissance totale de notre régime à réformer, ou à édifier quoi que ce soit, on ne peut que rougir. »

    à lire ses réflexions journalières sur la politique intérieure ou la politique étrangère, à constater l’étendue de ses relations et la connaissance qu’il avait des hommes, on ne peut que se dire que, comme Mazarin ou Richelieu, le cardinal Baudrillart eut fait un excellent premier ministre de la monarchie, et il le savait certainement. Les missions que lui confia, de temps à autre, le gouvernement français, et même sa fonction de recteur de l’Institut catholique de Paris, étaient bien au-dessous de ses capacités.

    « L’agitation continue en Espagne, de caractère révolutionnaire, terroriste, incendiaire, surtout à Grenade. Les prisons regorgent de généraux et d’officiers. Vit-on pareil spectacle sous Alphonse XIII ? » (13 août) 

    « Ah ! pourquoi avoir évacué Mayence, criminelle folie. » (14 août)

    « Aujourd’hui, partout, les gens de gauche peuvent faire ce qu’ils veulent et les gens de droite à peu près rien. » (17 août)

    « Le ministère Paul-Boncour est constitué, le 91e depuis la proclamation de la République en 1870 ; la principale qualité qu’on lui reconnaisse, c’est son incapacité à durer. » (19 décembre)

    « … Voilà la pétaudière politique. Hélas ! il y a aussi la pétaudière catholique. Aujourd’hui le

    cardinal Verdier publie une lettre qui est l’apologie de l’ACJF attaquée avant-hier matin par Castelnau. Que nous sommes loin de cette audience pontificale du 29 décembre 1929 – trois ans – où le pape sembla donner la France catholique à deux chefs, le cardinal Verdier et le général de Castelnau, enfin mit tout son espoir dans l’action catholique que l’on allait organiser. Elle existe aujourd’hui sur le papier, mais elle n’aboutit à rien. » (25 novembre).

    Article en intégralité dans lovendrin n°17.


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  • Editorial

    Beata ubera - Birkini - Abou Dhabi

    Une dépêche de l’AFP du 28 février annonçait la découverte d’une statue «d’une Vierge impudique» du XVIe siècle. «Joyau de l’art breton, la vierge de Kerluan tient entre ses doigts un téton fièrement dressé, prêt à nourrir le divin enfant. La statue, en granit, avait été cassée lors de la Révolution, puis reconstruite, avant d’être enterrée par l’abbé Alfred Le Roy [en 1904], curé de Châteaulin, qui décida de la remplacer par une vierge en plâtre, plus pudique.» Brave curé de Châteaulin, en avance sur la réforme iconoclaste Vatican II ! Remplacer une Vierge en granit par une Vierge en plâtre est déjà une belle preuve de goût. Un détail en passant, de ceux qui échappent aux journalistes : la Vierge «a été mise au jour début février à la faveur de travaux entrepris après le passage de vandales dans la chapelle.» Des Vandales ? ou des Sarrasins ?

    Réaction révélatrice, et sur deux points : artistique, social. Elle confirme que les journalistes n’ont aucune notion d’histoire de l’art. Des Vierges qui allaitent, il y en a eu beaucoup, dès les treizièmes quatorzièmes siècles. Le Greco, De Vinci, Zurbaran, Gossaert, G. David, Bramentino en ont peint. Outre que cette représentation s’imposait quasi naturellement du fait de la Maternité de la Vierge, elle trouvait sa justification dans l’évangile selon saint Luc qu’on lit le troisième dimanche du Carême (11, 14-28), avec ces paroles d’une femme du milieu de la foule qui écoutait la prédication du Christ : «Heureux le ventre qui vous a porté, et les mamelles que vous avez sucées.» (Beatus venter qui te portavit, et ubera quae suxisti) Ce que le Christ ne contredit pas.

    Elle confirme également que désormais l’allaitement est choquant. Activité impure, contraire à l’hygiène. En cela, cette histoire de sculpture est la suite de cette histoire de santon (lovendrin, n°15, page 12) représentant la Vierge enceinte (citons en passant la belle Madonna del Prato de Piero Della Francesca), ce qu’une dépêche jugeait devant être scandaleux. Cette haine de la représentation de la maternité correspond à la promulgation de l’image positive de l’avortement. Celui-ci encouragé, celle-là de plus en plus tabou.

    Burkini

    Résolument pudique s’annonce la mode à venir, avec le burkini, costume de plage mis au point par une musulmane australienne pour que ses coreligionnaires puissent «elles aussi s’adonner aux joies de la plage tout en respectant leurs convictions» (AFP) Article mensonger, puisque le burkini est annoncé «entre burka et bikini» ; or on nous le décrit enveloppant «l’ensemble du corps, des cheveux jusqu’aux chevilles» (photos), il n’a donc aucun rapport avec aucun bikini. Il y a là une manière de vouloir nous faire croire que l’Islam entre en modernité via le respect de la femme alors qu’il n’en est rien ; le mufti d’Australie Taj Aldin al-Hilali ne s’y est pas trompé et a donné son accord pour la commercialisation de ce qui n’est rien d’autre que le costume de bain des années 1890, version polyester (et encore! celui de Mme Vernet dans L’écornifleur était «collant, révélateur, couleur de chair, transparent»). Calculez vous-même le retard, et imaginez un remake hallal d’Alerte à Malibu… ou bien Ursula Andress sortant de l’eau en burkini... et faites faire un seul tour à votre sang.

    Abou Dhabi

    Le Louvre s’exporte en pièces détachées. Cela aboutira peut-être à son démantèlement. Si une concentration d’œuvres en un lieu présente des risques – imaginez le Louvre glissant tout entier dans la Seine, «et l’étang profond et croupi placé à mes pieds se referma tristement et silencieusement sur les ruines de la maison Usher» – et si, donc, un semis minimum à l’étranger est souhaitable, les prêts envisagés dans le cadre du futur Louvre Abou Dhabi ne présentent pas toutes les garanties. Les émirats Arabes Unis sont-ils un endroit sûr ? Il n’est pas évident que l’installation d’œuvres occidentales chrétiennes agrée à tout le monde, ni que des nus féminins désarment des bras doryphores. Il est douteux qu’elle sorte les Arabiens de cette léthargie spirituelle qu’est l’aniconisme, lequel peut se transformer en un fébrile iconoclasme. Bien sûr, tout va pour le mieux : il s’agit «de porter le message universel et humaniste voulu par les deux pays»* ; ou, comme l’a écrit Jacques Chirac au Président des éAU à cette occasion, de défendre «la conception d’un monde où l’on peut être fier de ses racines et de son identité, mais également tourné vers l’Autre et conscient de l’égale dignité de toutes les cultures.» C’est pour de faux : car on sait que Chirac (qui va désormais habiter rive gauche) a honte de ses racines et qu’il est convaincu de la supériorité des cultures extra-européennes. En réalité ce discours culturel n’est qu’un alibi, l’apport financier de l’opération étant l’élément déterminant. Comme le constate Laurent Dandrieu : cette location «témoigne surtout de la faillite de nos finances publiques, et de l’incapacité de l’état à assumer les charges financières de sa politique culturelle tous azimuts. On avait pourtant cru comprendre que l’exception culturelle, c’était de ne pas considérer les œuvres comme des marchandises. Il faut donc en convenir : l’exception culturelle est morte à Abu Dhabi.»** Le Ministre de la C. & C., Ph. D. de V., a quant à lui rassuré les conservateurs des Musées de France: les œuvres prêtées seront insaisissables, les Français procèderont eux-mêmes à la sélection. Enfin… «Non, il n’y a pas d’interdits quant au choix des œuvres. [...] Il est évident que nous devrons faire preuve de tact et que nous n’allons pas délibérément rechercher la provocation en organisant par exemple une exposition sur l’érotisme des grands maîtres.»* En cas de désaccord, je suggère qu’on revête les sculptures de burkinis.

    Samuel

    *Dossier de presse: Création du musée universel Louvre Abou Dabi, (6 mars 2007).

    **Sur le blogue Valeurs Actuelles (7 mars 2007).


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