• Antiquité

    Au musée du Louvre

    L’antiquité par l’image
    Présent du 9 octobre 2010

    La connaissance directe des œuvres de l’Antiquité a longtemps été limitée. A part à Rome, nulle part n’existait de « musées » qui fissent le tour de la question. Les livres illustrés ont cherché à pallier ce manque. De 1600 à 1800, il n’est pas interdit de parler, pour certains ouvrages, de « musées de papier ». Ils visent à l’exhaustivité, associent une illustration de qualité à un commentaire érudit.

    Premier « museo cartaceo », l’encyclopédie de Cassiano Del Pozzo, dont la partie consacrée à l’Antiquité a inspiré de nombreux continuateurs : Pietro Sante Bartoli lui emprunte par exemple une scène de banquet au bord de l’eau, délicate aquarelle, relevé d’une mosaïque de Palestrina. Autre aquarelle, le relevé des très élégantes arabesques d’une fresque du tombeau des Nasons (Rome, illustration).

    L’Antiquité intéresse depuis le XVe siècle, presque exclusivement, mais finit par éveiller la curiosité pour le passé en général : la continuité se fait entre Antiquité païenne et chrétienne, entre Antiquité et Moyen Age. En France au XVIIe, Jean Mabillon, en écrivant l’histoire de l’ordre de saint Benoît, se penche sur la statuaire chrétienne. Des gravures de sculptures illustrent son ouvrage. Son contemporain, Gaignières, relève sculptures et portails de Chartres, du Mans, de Paris, étend sa curiosité à l’art gaulois qui ne lui paraît pas indigne. A leur suite, le bénédictin Bernard de Montfaucon (1655-1741) fournit le travail le plus considérable. Les Monuments de la Monarchie française paraissent de 1729 à 1733. Il réutilise les dessins de Gaignières, emploie Antoine Benoist pour d’autres (dessin préparatoire et gravure : roi mérovingien du portail de Saint-Denis).

    La passion du Moyen Age, on le voit, ne naîtra pas ex nihilo au XIXe. Elle a eu des prémices dès la fin du XVIIe. Elles concernent plus les historiens que les artistes, mais les œuvres sont prises en considération.

    Montfaucon est également l’auteur de l’Antiquité expliquée en figures, cinq tomes parus en 1719, pas moins de 1 355 figures… Les dieux égyptiens y sont présents, comme dans d’autres ouvrages les dieux étrusques.

    Les fouilles d’Herculanum (à partir de 1738) et de Pompéi (vers 1750) relancent les recherches en donnant du grain à moudre aux antiquaires et font éclore le goût néoclassique. Le comte de Caylus, en 1761, publie son Recueil d’antiquités égyptiennes, étrusques, grecques, romaines et gauloises. Car la Grèce n’a pas été oubliée : un recueil de 44 dessins datant de 1674 recense les métopes sud du Parthénon, bons dessins à la sanguine sur fond de mine de plomb. Julien-David Le Roy dessine les Ruines des plus beaux monuments de la Grèce (1758, par exemple une vue des ruines des Propylées). Ses gravures seront critiquées pour leurs approximations par James Stuart qui publie à partir de 1762 les Antiquités d’Athènes mesurées et dessinées.

    En effet, l’exactitude scientifique prévaut peu à peu, ainsi que la recherche des canons antiques (artistiques et architecturaux), crus clés de l’excellence : Les Edifices antiques de Rome dessinés et mesurés très exactement paraissent en 1682. Antoine Desgodetz, l’auteur, a été envoyé pour cela à Rome par Colbert. L’année suivante paraissent Les proportions du corps humain mesurées sur les plus belles figures de l’antiquité, d’un artiste : le graveur Girard Audran. Il démontre, à partir d’un dessin, que le Laocoon fait « 7 têtes, 2 parties, 3 minutes ».

    Musées de papier : de l’ouvrage de Giuseppe Bianchini, Demonstratio historiae Ecclesiasticae (1752-1754), se déplient de grandes gravures où les bustes, les médailles sont présentées non en planches mais en vitrine de musée. Deux musées romains voient leurs collections mises en livres, avec gravures et notices (XVIIIe) : le musée Capitolin, le musée Pio-Clémentino.

    Ce catalogage, ces mesures fondent l’histoire de l’art comme science. Johann Joachim Winckelmann (1717-1768) en est l’un des fondateurs, de même qu’Agincourt (1730-1814) dont l’Histoire de l’art par les monuments, depuis sa décadence au VIe siècle jusqu’à son renouvellement au XVIe siècle (publiée de 1810 à 1823) fait la part belle à la comparaison des formes pour apprécier leur évolution. Cependant, on l’a compris, le formidable travail des antiquaires qui les ont précédés n’a été en rien de l’amateurisme.

    Quelques œuvres agrémentent le parcours. Des bronzes : Le tireur d’épine offert à François Ier par le cardinal Hippolyte d’Este, le Gladiateur Borghèse offert par Le Nôtre à Louis XIV, les grandes répliques de la Vénus callipyge et de l’Apollon du Belvédère achetées par Madame du Barry. Une singerie de Chardin : un singe en antiquaire, entouré de ses livres, de ses médailles qu’il examine, loupe en main.

    Samuel

    Musées de papier. L’Antiquité en livres, 1600-1800.

    Jusqu’au 3 janvier 2011, Musée du Louvre.

    illustration : Pietro Sante Bartoli, relevé d’une fresque des Nasons, dessin aquarellé © BnF


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