• Gandhara

     

    Au musée Guimet

    <o:p></o:p>Le grand art du Gandhara

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    Présent du 5 juin 2010

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    Le musée Guimet avait présenté en 2007 l’Afghanistan antique.  Avec les arts du Gandhara, nous nous transportons plus à l’Est, sur les terres de l’actuel Pakistan. Nous touchons le terminus oriental des conquêtes d’Alexandre, qui atteignit le Pendjab. Des colonies grecques y subsistaient au début de notre ère, rejointes par les réfugiés qui avaient fui l’Iran sur lequel des envahisseurs étaient tombés. La dynastie kouchane allait développer dans la région une civilisation bouddhique marquée par l’art grec. L’art du Gandhara a été qualifié de gréco-bouddhique par Alfred Foucher, qui soutint sa thèse en 1900 sur le sujet, après avoir mené des fouilles à la frontière indo-afghane.<o:p></o:p>

    Des trois musées qui ont recueilli les vénérables sculptures, le plus ancien est celui de Lahore. Le père de Rudyard Kipling en fut conservateur de 1875 à 1894. Le romancier fait commencer Kim, roman d’un orphelin irlandais apprenti-espion, à Lahore même, face au musée que les indigènes appellent la Maison des Merveilles.<o:p></o:p>

    Merveilles est le mot juste. Taillés dans un schiste tantôt vert, tantôt noir, les bas-reliefs racontent la vie du Bouddha ainsi que des scènes profanes : la visite en palanquin, le retour au palais, musique et danse, l’école. La sculpture est sans complexe. Elle va droit au but. Le talent n’est pas également réparti, mais tous les reliefs indiquent « un ciseau rompu à la technique des ateliers de Grèce et d’Italie » (Alfred Foucher). Sans ignorer les influences indo-parthes et indo-scythes, l’empreinte de la patte hellène est trop marquée pour que le contact n’ait été qu’une influence : des sculpteurs grecs ont officié dans ces contrées, ont transmis un métier, une esthétique.<o:p></o:p>

    Tel homme musclé s’inspire visiblement d’un colosse ou d’un kouros : il mérite le nom d’Atlas. Telle belle femme casquée, dont le drapé ne dissimule rien de la féminité, mérite celui d’Athéna. Le Bouddha est un mélange de sage indien et de prince indo-grec, apollinien. Les colonnes qui délimitent les scènes supportent des chapiteaux plus souvent corinthiens qu’indiens.<o:p></o:p>

    Rien ici de l’abâtardissement de l’art grec au contact de l’art égyptien dégénéré. Nous ne sommes pas en présence du métissage de deux arts, mais d’un art mis au service d’une religion dont, a priori, il n’était pas destiné à exprimer les croyances. La première image du Bouddha était réputée achéiropoïétique. Est-ce au contact de la culture grecque que le bouddhisme pakistanais a rompu avec l’interdiction de représenter Bouddha autrement que par un symbole ? Ses premières images sont-elles celles du Gandhara ? On le pensait autrefois, on n’en est moins sûr aujourd’hui. <o:p></o:p>

    Au contact de l’Asie, puis avec l’apport romain, les gènes grecs ont muté et donné ce résultat étonnant, que nombre de sculptures semblent appartenir à la sculpture chrétienne médiévale. Un chapiteau s’inspire d’un modèle corinthien mais un personnage émerge du feuillage, encadré par deux volutes et deux fleurs qui mordent sur le tailloir : n’était la pierre, ce serait de l’art roman caractérisé. Les animaux fantastiques, taureaux et boucs marins, anguipèdes ailés, ont leurs descendants sur une archivolte corse, sur un chapiteau italien. Des anguipèdes musiciens à double queue annoncent les sirènes bifides et les ânes harpistes.<o:p></o:p>

    Les scènes de vendanges, inspirées par le voyage mythique de Dionysos en Asie, rappellent les travaux des mois qui animent les portails gothiques. La même simplicité, la même proximité les a inspirées. Les soldats de Mara, le roi démon manipulateur et pervers qui tente Bouddha pour l’empêcher d’atteindre l’Eveil, sont les cousins des diables qui peuplent les enfers médiévaux : hures, crinières, grimaces, le Mal a partout même visage (illustration).<o:p></o:p>

    Deux stèles ambitieuses, La visite d’Indra et L’apothéose bouddhique présentent le Bouddha environné de divers personnages. La narration cède le pas à la contemplation. La seconde stèle, avec des personnages dont certaines attitudes sont analogues à celles des Vieillards de l’Apocalypse, est profondément fouillée, par un artifice osé : le relief est entièrement creusé par derrière. Kipling décrit l’étonnement d’un lama descendu de sa montagne devant ce chef-d’œuvre réalisé « par des artisans oubliés, dont le génie grec, à la suite de transmissions mystérieuses, était venu si loin de sa patrie, et non sans bonheur, guider la main ». Cette sculpture est postérieure aux reliefs de l’époque kouchane. Influencée par l’art gupta, elle date des V-VIe siècles. Les grands personnages auxquels le schiste noir donne l’apparence du bronze, du monastère de Sahri Bahlol, sont eux aussi tardifs. L’art du Gandhara prend fin, dignement, avant les invasions musulmanes du VIIe siècle.<o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    Pakistan, terre de rencontre – Les arts du Gandhara (Ier-VIe siècle).

    Jusqu’au 16 août 2010, musée Guimet. <o:p></o:p>

    illustration : Soldats de Mara, Pakistan, Lahore Museum © Droits réservés

     

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