• Caillebotte (Gustave et Martial)

    Au musée Jacquemart-André

    Les frères Caillebotte

    Présent du 9 avril 2011

    On ne présente plus Gustave Caillebotte (1848-1894). Il a étudié aux Beaux-Arts après avoir passé un an dans l’atelier de Léon Bonnat, un peintre académique que la jeunesse, Alphonse Allais en tête, a beaucoup moqué. Rebuté au Salon, Caillebotte se lia avec les impressionnistes, pour lesquels il fut un ami et un mécène. Compagnon de route, c’est un peintre non moins important.

    Il restait à présenter, en sa compagnie, son frère Martial (1853-1910). Lui, entra au Conservatoire. Il apprit la composition pour piano, orchestre, trouva son inspiration dans la musique religieuse. Il n’alla pas aussi loin que son frère dans son art et, la quarantaine passée, s’exprima surtout à travers l’objectif. Ce photographe amateur le fut avec professionnalisme. Ses tirages sont soignés, étudiés.

    Confronter les photographies du cadet aux peintures de l’aîné, évoquer une affection fraternelle et une ambiance familiale, tel est l’objet de l’exposition du musée Jacquemart-André.

    Les Caillebotte sont une famille bourgeoise parisienne aisée. Le père a fait fortune en fournissant lits et draps à l’armée. A sa mort en 1874, les enfants se trouvent à l’abri du besoin, libres de s’adonner à leurs passions. Deux autres décès assez proches achèvent de lier Gustave et Martial : décès de leur frère René, de leur mère.

    Le peintre et le photographe vivent dans le quartier neuf du boulevard Hausmann, de la rue Miromesnil, aux larges perspectives. Les cadrages sont audacieux, que Gustave regarde la perspective depuis le balcon (illustration), ou la rue en plongée, depuis le même balcon. Le Boulevard vu d’en haut et Un refuge, boulevard Hausmann, expérimentent avec succès cet angle difficile. Le premier est printanier, de jeunes feuilles s’interposent entre le peintre et le trottoir, comme une japonaiserie parisienne.

    Quand Martial se met à la photographie, son frère a peint l’essentiel de son œuvre. Il s’en inspire pour les cadrages et, en frère d’impressionniste, il étudie les modifications du climat, effets de neige, de brouillard. Ses petits clichés nous ramènent à un vieux Paris : le Sacré-Cœur en construction, l’éclectique palais du Trocadéro, façon Opéra, qui sera détruit en 1937, mais aussi les rues avec leurs paveurs, les ouvriers, une pissotière, la descente d’un réverbère du Pont de la Concorde…

    Le métier de Gustave se fait pesant lorsqu’il s’occupe de portraits et d’autoportraits. Les photographies de Martial sont meilleures, voici la vie de la bourgeoisie avec ses loisirs, ses repas, ses discussions au salon, ses séjours au bord de la mer. On aperçoit la sympathique silhouette ventrue de l’abbé Alfred Caillebotte, demi-frère né d’un premier mariage. Les enfants de Martial (Jean et Geneviève) sont un sujet de choix, ils jouent au jardin, lèchent des cuillères tirées d’une bassine de cuivre (illustration) ; la première coupe de cheveux du garçonnet, à l’âge de dix ans, est un document quasi ethnographique : il entre dans la classe des hommes. C’est aussi l’épouse du photographe, dans sa baignoire, ou celui-ci se rasant.

    La vie parisienne ne se limite pas à l’urbain : la banlieue campagnarde compte. La propriété paternelle est à Yerres ; les frères acquièrent un domaine au Petit Gennevilliers. Gustave étudie les jeux du soleil et de l’ombre : le jardin potager des deux propriétés est traité de façon vibrante, celui du Petit Gennevilliers avec une douceur particulière.

    Gustave se passionne pour les fleurs, qu’il cultive avant de les peindre. Un goût d’horticulteur et d’artiste qui renforce son amitié avec Claude Monet, lequel dans sa propriété de Giverny y donne libre cours. Gustave n’aime pas les fleurs en vase : il les peint en parterre ou dans la serre. Des marguerites, des orchidées, et une magnifique toile représentant un pied de capucines, aériennes et fraîches. Si le collectionneur privé veut s’en dessaisir, écrire au journal.

    Les frères s’intéressent aux trains, aux premières voitures, mais plus que tout aux voiliers. Ils participent aux régates sur la Seine. Gustave se fait architecte de marine, il conçoit et surveille la construction de modèles adaptés à la course. Photos de voiliers, peintures de voiliers, mais tout ne se vaut pas dans les grandes toiles, certaines tuées par le travail comme celles qui composent le triptyque de 1878. Elles sont surpassées par les Bateaux à l’ancre, immobiles dans la lumière mélancolique.

    Samuel

    Dans l’intimité des frères Caillebotte, peintre et photographe.

    Jusqu’au 11 juillet 2011, Musée Jacquemart-André.


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