• Collection Georges de Lastic

    Au musée de la Chasse et de la Nature

    La collection Lastic

    Présent du 19 février 2011

    Georges de Lastic a été conservateur au musée de la Vénerie (Senlis) à partir de 1955 puis au musée de la Chasse (Paris) à partir de 1962. Il a constitué sa propre collection et a contribué à enrichir celles des musées. Lesquels lui rendent aujourd’hui hommage. Le musée de la Chasse, devenu à bon droit « et de la Nature » lors de sa réouverture fin 2006, reconstitue le cabinet de cet amateur et signale, dans ses collections, les œuvres qu’il a fait entrer.

    Le portrait de La Jonchère, par Hyacinthe Rigaud (1659-1743), est typiquement XVIIIe par le traitement franc du costume (ici le splendide rouge et noir costume d’apparat de l’ordre de Saint-Louis) et par celui, flou, du visage : les traits n’y sont pas affirmés, comme si l’artiste hésitait à préciser le caractère concret de la tête humaine.

    Antérieurs de plusieurs décennies dans la carrière de Rigaud, trois portraits d’artistes : Antoine Coysevox, Gabriel Blanchard, un anonyme. Le négligé de la mise est une convention de la représentation de l’artiste au travail. On se souvient d’une exposition des Beaux-Arts où, au vu d’un débraillé analysé comme un indice de non-conformisme, un buste d’Hubert Robert était étiqueté contestataire – contresens d’autant plus malheureux qu’il paraissait volontaire.

    C’est au travail que se représente le grand ami de Rigaud, Nicolas de Largillière (1656-1746), dans le dernier autoportrait de sa carrière, toile austère. L’artiste tient un porte-mine. Il s’apprête à mettre en place la composition sur une toile.

    Cette toile vierge n’est pas blanche. Les toiles modernes sont toutes couvertes d’une impression d’un blanc éclatant. Les anciens n’en usaient pas ainsi. L’impression était colorée. On le constate en comparant les toiles inachevées : impression ocre rouge (portrait de Gabriel Blanchard), impression grise (autoportrait de Largillière), impression vieux rose (tête de femme, par Pierre Mignard). L’impression donnait une unité à l’ensemble et conditionnait la luminosité et la tonalité générale de l’œuvre. Elle permettait d’indiquer les lumières d’une composition dès le début, d’avancer le travail par partie (d’achever le visage sans avoir entamé l’habit) sans être gêné par le blanc, dont la moindre parcelle subsistante perturbe la perception du travail déjà effectué.

    Le père de Largillière commerçait à Anvers, il plaça son fils chez le peintre Anton Goebow, spécialisé dans les bambochades. Puis Nicolas devint en Angleterre l’élève de Pierre Lely. Rentré à Paris, il attira l’attention de Le Brun et fut reçu peintre d’histoire à l’Académie en 1686. Largillière peignit des portraits d’aristocrates, mais sa clientèle fut essentiellement bourgeoise. « Ce peintre eut peu de liaison avec la Cour auprès de laquelle il n’a jamais fait aucune démarche ; il aimait mieux, à ce qu’il m’a dit plusieurs fois, travailler pour le Public : les soins en étaient moins grands, et le paiement plus prompt », écrit un biographe anonyme en 1752. L’inspiration de Largillière n’est pas démesurée. Il peignit trop de pratique, mais un heureux métier rattrape cela.

    L’œil se perd dans une toile comme La marquise de Noailles et ses enfants, mais le métier est large et lisible dans un portrait de gentilhomme inconnu (vers 1685, illustration). Largillière passa, un temps, pour le Van Dyck français, puis la postérité lui préféra Rigaud. Dans la nature morte, il donne trop dans le brillant, mais certaines parties – une jatte de pêches – laissent présager la matière de Chardin.

    Largillière eut Oudry (1686-1755) comme élève. De celui-ci, Lastic posséda deux des beaux dessins illustrant les Fables de La Fontaine. C’est en tant que peintre animalier qu’on retrouve Oudry dans les collections du musée : la célèbre Lice et ses petits.

    L’autre grand animalier français, Desportes (1661-1743), reçut en 1702 la commande des portraits des plus belles chiennes de chasse du roi : Lise ; Diane et Blonde… Ses études (chiens, papillons, pies, chouettes, etc.) n’ont d’égales que celles de Pieter Boel (1626-1674). Les œuvres de Boel furent d’ailleurs longtemps confondues avec les siennes. G. de Lastic a contribué à les distinguer. Boel était anversois et travailla auprès de Le Brun aux Gobelins. Desportes lui-même avait eu pour maître un Flamand domicilié à Paris, Nicasius Bernaert.

    Froids, froids les dessus-de-porte de Desportes (1713) en comparaison des études. Leur intérêt est plus iconographique car ils représentent des animaux et des plantes exotiques. Un coup de foudre : La chasse au renard de Pol de Vos, vivante, aux délicieux tons bleu passé et ocre. Une vieille liaison : Le canard à la bigarade de Chardin, dans des gris terreux où les touches d’orange et de vert presque noir se font violence.

    Samuel

    Georges de Lastic – Le cabinet d’un amateur.

    Jusqu’au 13 mars 2011, musée de la Chasse et de la Nature.

    illustration : Nicolas de Largillière, Portrait d’un gentilhomme inconnu© David Bordes


    Tags Tags : ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :