• Dessins florentins

    A l’Ecole des Beaux Arts<o:p></o:p>

    Dessin florentin

    Présent du 7 mars 2009<o:p></o:p>

    Le dessin à Florence a été l’objet d’un culte. La création en 1563 de l’Académie de Dessin où collaborent peintres, sculpteurs et architectes, n’est pas tant un acte fondateur que la reconnaissance d’une pratique séculaire jugée représentative du génie local. Dès le quatorzième siècle Pétrarque a énoncé que le dessin est la base de l’art, principe réaffirmé ensuite par Cennino Cennini dans son Livre de l’Art (1437). Le jeune artiste doit dessiner chaque jour, au stylet de plomb la première année puis à la plume. « Ce qui t’arrivera en pratiquant le dessin de la plume, c’est une habileté, une adresse qui te rendront capable de faire sortir bien des choses de ta tête. » A la pratique quotidienne, Cennini associe une hygiène de vie : l’artiste doit déjeuner de pâtes et boire des vins légers ; éviter les occupations qui gâtent la main, comme jeter des pierres ou s’adonner à la galanterie.<o:p></o:p>

    La formation passe par le dessin d’après nature et, à la Renaissance, d’après l’antique. La combinaison des deux mène à l’étude de l’anatomie et au nu. Les artistes dissèquent en compagnie des savants. André Vésale, médecin de Charles Quint, publie sa monumentale De humani corporis fabrica (1543) dont les planches ont requis chirurgiens et artistes et serviront aux uns autant qu’aux autres. Les études anatomiques de jambes par Perin del Vaga témoignent de son profond intérêt pour les os et les muscles ainsi que de sa remarquable maîtrise de la plume. Par ailleurs certains penchants ne sont pas étrangers à la multiplication des nus masculins et musculeux, penchants répandus dans les sphères artistiques et ecclésiastiques. Deux sonnets des Regrets moquent le « Jupiter romain » (Jules III) qui à peine élu pape éleva son Ganymède au cardinalat. <o:p></o:p>

    La formation passe également par le dessin d’après l’œuvre des grands – « Fais-en tes délices », écrit Cennini – et davantage encore d’après leurs dessins. Car le dessin semble porteur d’une vertu particulière, il exprime la quintessence du génie, l’idée pure au moyen d’une technique désincarnée. Toute une tradition se fonde sur les dessins d’un maître que seul Bandinelli envisage de dépasser : Michel-Ange. Le carton de la Bataille de Cascina est objet d’étude pour tous les artistes. L’Ecole des Beaux Arts s’enorgueillit d’une étude pour un esclave du tombeau de Jules II. Les jambes et le torse l’ont accaparé, le travail est précis sans sécheresse, c’est un dessin de sculpteur qui prévoit déjà le marbre. <o:p></o:p>

    L’influence anatomique michelangélesque se constate chez Pontormo (étude de torse), chez Salviati : Hercule étouffant Antée, sujet commun à beaucoup d’artistes, prétexte à la démonstration de force du dessinateur puisqu’il met en scène deux corps puissants, l’un héroïque, l’autre titanesque. Une belle tête idéale de femme  poursuit aussi les recherches de « têtes divines » de Michel-Ange. <o:p></o:p>

    On raconte que Bandinelli, par haine de Michel-Ange, détruisit le carton de la Bataille de Cascina, dont la composition ne nous est plus connue que par une copie d’Aristotele de Sangallo. L’art violent de Bandinelli est représenté par quelques beaux papiers griffés par la plume. Les dessins de Déploration et de Mise au tombeau, thèmes chéris de l’artiste, sont traités de façon tourmentée. Adam et Eve implorant l’Eternel, celui-ci plus jupitérien que yahviste, est un dessin préparatoire destiné à être présenté au commanditaire des bas-reliefs de marbre du chœur de Sainte-Marie des Fleurs. Son élève Giovanni Bandini travailla également aux marbres du Duomo. Une étude d’apôtre, dépouillée, lumineuse, est une merveille de maîtrise de la plume (illustration).<o:p></o:p>

    Le trait d’Andrea Del Sarto est en comparaison plus rond (deux visages, pour une Sainte Catherine et pour un portrait). Ce dessin moins convaincant ne doit pas cacher l’importance de son atelier où se formèrent de nombreux artistes, parmi lesquels Giorgio Vasari qui avait étudié précédemment avec Michel-Ange et poursuivit avec Bandinelli. Vasari était réputé pour son savoir-faire, visible dans La récolte de la manne, mise au net d’une soigneuse composition, et pour sa facilité à couvrir de fresques les murs les plus vastes. Il fut à l’origine de l’Académie, qui rendit l’anatomie obligatoire et, bientôt, obligatoire aussi la copie des œuvres de Michel-Ange, scolarisation de l’apprentissage fort éloignée de l’apprentissage chez un maître ; constitution d’un programme totalement absent des pages de Cennini qui respirent la liberté et le plaisir. Mais n’accablons pas Vasari qui en écrivant La Vie des plus excellents peintres, sculpteurs et architectes, nous a transmis des informations sans prix sur les artistes italiens de son époque, biographiques, artistiques et techniques : il a fondé l’histoire de l’art.<o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    Le dessin à Florence au temps de Michel-Ange, <o:p></o:p>

    jusqu’au 30 avril 2009, Ecole Nationale des Beaux Arts<o:p></o:p>

    Illustration : Giovanni Bandini, Etude d'apôtre @ ENSBA, 2009<o:p></o:p>


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