• Espagne

     

    Au musée Jacquemart-André<o:p></o:p>

    De l’Espagne<o:p></o:p>

    Présent du 17 avril 2010<o:p></o:p>

    La peinture espagnole a moins la cote que la peinture italienne. Les expositions générales ou particulières sont en comparaison fort rares. La collection de Pérez Simon, homme d’affaires, né dans une famille espagnole installée au Mexique – un cousin de Carlos Solis ? – n’a pas la prétention d’offrir un panorama complet de la peinture espagnole. Vélasquez, pour ne citer que lui, est absent. Les coups de cœur en dictent la constitution, également les disponibilités du marché. L’Espagne est, quant aux œuvres d’art, un pays des plus restrictifs en matière de sortie du territoire. La présentation est thématique et non chronologique, malgré le titre : Du Gréco à Dali. Celui-ci n’est pas un peintre intéressant. Son inspiration est aussi maigre que sa brosse, qui continue une manière ingresque. <o:p></o:p>

    Le Greco est bien plus mystérieux. Cette tête de Christ est une miniature peinte vers 1600 (illustration, 10 cm de haut) : c’est fait avec rien et c’est prenant. Le Greco s’est formé en Crète, à Venise, à Rome, avant de s’installer en Espagne. Il vécut et mourut à Tolède après le rejet d’une première commande par Philippe II. Celui-ci ne retrouvait pas dans le retable réalisé la raison, le respect des lois de la nature. Ni vénitien ni romain, ni espagnol, le Greco restait byzantin, un byzantin « libéré » de l’icône mais non convaincu par les « acquis » de la Renaissance occidentale.<o:p></o:p>

    Philippe II a une fort mauvaise réputation. Verlaine a écrit, sur son agonie, des quatrains où le trait est noirci à plaisir. Le roi aimait l’art mais son esprit tatillon ne s’accommodait pas du besoin d’indépendance qui travaille les chats et les artistes. Charles Quint, d’une meilleure nature, avait entretenu avec les peintres des rapports plus épanouis. Philippe II lui ressemblait au moins physiquement, on le constate dans deux beaux portraits, réalisés non d’après nature mais à partir d’autres tableaux (celui de Philippe II d’après Moro).<o:p></o:p>

    Au siècle suivant, Murillo développe un art savant et moelleux. Les tons mordorés de L’Immaculée Conception, les tons bleu et blanc des habits ne font pas oublier la tête de la Vierge, qui n’est pas à la hauteur. Le sfumato nuit à son Jean-Baptiste adolescent et à ses suiveurs (Miguel de Tovar, La divine bergère).<o:p></o:p>

    Ribera, lui, pratique une mâle peinture qui ne se soucie pas de plaire. Formé à Naples, d’où il travaille pour Philipe IV, il révèle le réalisme caravagesque à l’Espagne, toute disposée à le recevoir : le Saint Jérôme est abrupte, la Sainte Marie l’Egyptienne en lévitation est rude. Elle s’élève sous les yeux dubitatifs de l’abbé Zosime, à qui l’intention de la lévitation paraît suspecte. Le phénomène ne serait-il pas démoniaque ? La sainte, qui lit dans ses pensées, le rassurera. Elle est vêtue du manteau que l’abbé lui a donné alors qu’elle errait nue, un manteau d’une insupportable teinte chocolat – et pourtant ça passe. Fidèle globalement au récit de la Légende dorée, le peintre n’a pas osé représenter Marie l’Egyptienne noire et brûlée par vingt ans de vie dans le désert.<o:p></o:p>

    Apparu à l’époque romantique, le costumbrisme perdure au-delà. Littéraire, musical et pictural, le costumbrisme s’attache à dépeindre les coutumes nationales populaires. Inspiration de la terre natale qui peut tomber dans le folklore, la couleur locale. Relèvent du costumbrisme, aussi bien la désuète peinture de Barron y Castillo (Figures élégantes dans Séville, début XIXe), le fauvisme distingué d’Anglada-Camarasa (Feria de Valence, 1907), que le pesant réalisme social de Zuloaga y Zabalata (Les vendangeurs, 1905).<o:p></o:p>

    Car au naturalisme, l’Espagne paye son tribut, pas moins qu’un autre pays. La collection de M. Pérez Simon également. Le susdit Zuloaga peint une femme jaunâtre, à mantille et en prière, au regard vicieux. Madrazo y Kuntz fait le portrait d’une femme du monde ou d’une catin, on hésite. Tout le naturalisme est dans ces bassesses. <o:p></o:p>

    Aux alentours de 1900, les peintres se provoquent aux jeux d’eau et de lumière. Ils rivalisent de virtuosité en matière de reflets. Une baigneuse de Buñol se tient dans la moyenne académique. Au miroitement, à l’aveuglement, Joaquim Sorolla excelle, dans un registre élevé (Soleil du matin ; Enfants dans les rochers). Gordoy y Castro fait jouer une balançoire dans le soleil : grande toile vulgaire. <o:p></o:p>

    Comment ne pas la comparer à une autre balançoire, par Goya (dans une autre collection particulière espagnole) ? Il y aura une horreur goyesque, mais d’abord il y a la grâce. Le portrait de Doña Maria Teresa de Vallabriga y Rozas, peint par Goya au début des années 1780, nous la montre toute proche, les yeux surpris et ne demandant qu’à nous croire. <o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    Du Greco à Dali – Les grands maîtres espagnols de la collection Pérez Simon. <o:p></o:p>

    Jusqu’au 1er août 2010, Musée Jacquemart-André.<o:p></o:p>

    illustration : Le Greco, Tête du Christ, Collection Pérez Simón, Mexico © Fundación JAPS © Studio Sébert photographes<o:p></o:p>


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