• Franco Battista


    Au musée du Louvre

    Dessins à foison

    Présent, 19 déc. 09


    Un Italien du XVIe siècle

    Né et mort à Venise (1510-1561), Battista Franco est le moins vénitien des Vénitiens, ou d’entre eux le plus romain, le plus florentin. Fils de peintre, il reçoit probablement de son père les premières leçons. Il se forme à Rome où il arrive en 1530, puis à Florence.

    L’influence de Michel-Ange est sur lui considérable, ce qui à l’époque n’a vraiment rien d’original. Il copie les figures du plafond de la chapelle Sixtine ; dessine les allégories du Jour et de la Nuit du tombeau Médicis.

    En 1536 il est chargé de réaliser les décorations à l’occasion de l’entrée triomphale de Charles Quint à Rome. La même année, à Florence, il réalise les décorations pour le mariage d’Alexandre de Médicis avec Marguerite d’Autriche, fille de Charles Quint. Il reste à la cour du duc Côme, où une grande partie de son ouvrage consistera en peintures éphémères, en arcs de triomphe provisoires dressés lors des événements politiques que sont les entrées, les mariages.

    Le 31 octobre 1541, chapelle Sixtine, est dévoilé le Jugement dernier. Battista Franco a fait le déplacement pour assister à ce « vernissage » sans commune mesure. Emerveillé, il dessine la vaste composition. Il reste à Rome, peignant des grotesques pour le palais d’un cardinal donnant sur la place Saint-Pierre (détruit lors de l’édification de la colonnade par le Bernin), ainsi qu’une Arrestation de Jean-Baptiste pour l’Oratoire San Giovanni Decollato. Ce tableau reste celui d’un « suiveur secondaire » (Itinéraires romains) : telle figure est une « transposition littérale et gratuite du michelangélisme ». Vasari, son confrère et biographe, note qu’à cette époque la peinture de Franco est très inférieure à son dessin.

    C’est à Urbino que Battista Franco digère Michel-Ange et s’épanouit (1543-1551). Il est au service du duc Guidobaldo II della Rovere. Là encore, son talent de décorateur est mis à contribution ; ainsi lors du mariage du duc avec Vittoria Farnese (1547), petite-fille d’Alexandre Farnese alors pape (Paul III, 1534-1549), fille du bouillant condottiere Pierre-Louis. L’activité de Franco se diversifie. Il dessine force décors pour la vaisselle en majolique, industrie locale : toute une série sur la guerre de Troie. Dans la cathédrale il entame un vaste cycle de fresques sur les Vies de la Vierge et du Christ. Une partie restera inachevée.

    Viennent d’autres années romaines, entre 1548 et 1552. Décorateur pour le théâtre, pour l’opéra, il est chargé de peindre les armes de Jules III, et obtient une commande prestigieuse : peindre les fresques de la chapelle Gabrielli à Sopra Minerva, qui s’avèrent son chef-d’œuvre. Puis, peut-être à cause de la cherté de la vie romaine, Franco retourne à Venise où il collabore à divers plafonds de divers édifices, tandis que son expérience dans le domaine de la majolique lui sert, appliquée à l’orfèvrerie.

    Plus habile à brosser de grandes peintures festives que doué d’un tempérament de peintre, c’est en dessinateur que Battista Franco se présente devant la postérité. Un dessin précis sans sécheresse (Le Christ parmi les docteurs), vigoureux (Etude pour Cronos), de belles attitudes (une splendide sanguine représentant six hommes). L’Espérance (illustration), est un dessin de la maturité, esquisse pour une peinture du Palais Ducal.

    La collection que possède le Louvre provient en grande partie de celle du banquier allemand Everhard Jabach (1618-1695) vendue à Louis XIV. Il tenait une partie de ses dessins italiens du portefeuille de Vasari lui-même. Sa collection ne se cantonnait pas à Battista Franco, puisque ce furent 5500 pièces qui furent vendues. De ce fonds est né le Cabinet des dessins.

    Des Européens, XVIe-XXe

    Georges Pébereau n’est pas un banquier mais un homme d’affaires français. Il a siégé au Conseil d’Administration du musée de 1996 à 2001, il est désormais administrateur de la Société des Amis. C’est en tant qu’ami qu’il offre au Louvre des dessins qui s’échelonnent du XVIe au XXe siècle, tous azimuts : commencée il y a une trentaine d’années, sa collection se veut éclectique, augmentée par coups de cœur.

    Je ne donnerai pas la liste des artistes, les Italiens du XVIe, les Allemands modernes, les Français. Chacun trouvera, comme G. Pébereau lui-même, son coup de cœur qui peut être l’allégorie de la Tragédie, de grand style, par Vanloo ; l’étude pour saint Protais, par Le Sueur ; Le combat d’un lion et d’un tigre par Delacroix ; une tête de femme par Van Gogh, étude pour ses célèbres Mangeurs de pommes de terre ; Le marchand de poissons, croqué par Géricault à Londres au crayon noir : une scène très Dickens… Et cetera, non inferiora.

    Samuel

    Battista Franco, un artiste vénitien dans les cours d’Italie.

    La collection Georges Pébereau, Maîtres du dessin européen du XVIe au XXe siècle.

    Jusqu’au 22 février 2010, Musée du Louvre.

    illustration : Battista Franco, L’Espérance © RMN / Thierry Le Mage


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