• Italie en négatifs

     

     

    Au Petit Palais

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    Le monde en négatif

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    Présent du 27 mars 2010<o:p></o:p>

    Les alchimistes des XVI et XVIIe siècles ne furent pas plus tenaces que les expérimentateurs en photographie au XIXe. Avec un ingénieux entêtement, ceux-ci manipulent l’argent et le platine ; le cuivre et le soufre ; le petit-lait et l’encaustique ; le papier salé et cet or qu’ils ne cherchent pas.<o:p></o:p>

    Le procédé par lequel Daguerre obtient une image sur cuivre est révélé en 1839. Procédé limité puisque l’image n’est pas reproductible. A la rigueur la transcrira-t-on en gravure, comme cette vue du lac Majeur ou cette vue de Florence, sous lesquelles il est mentionné : « Exécutée d’après l’original du Daguerréotype ».<o:p></o:p>

    Aussitôt connu le daguerréotype, John Talbot en Angleterre fait connaître sa technique, le calotype. Il a imaginé et réalisé le couple étonnant du négatif et du positif, donc la reproductibilité puisqu’à partir de l’épreuve sur papier salé on peut tirer autant d’exemplaires que souhaité. <o:p></o:p>

    La précision du daguerréotype séduit le positivisme de l’époque. Il l’emporte dans un premier temps sur le calotype. Cependant cette image unique est une impasse et, trop sèche, elle rebute les sensibilités artistiques plus attirées par les caractéristiques du calotype : un grain velouté, des tonalités différentes suivant le virage réalisé. Dans toute l’Europe naissent des vocations expérimentales qui s’essayent à cuisiner le calotype pour le perfectionner. <o:p></o:p>

    L’Italie devient dans les années 1840-1850 le laboratoire où chacun accourt avec son matériel, son impatience et sa minutie. Plusieurs raisons à cela. Parmi les artistes qui viennent y étudier, ils sont quelques uns à délaisser les arts pour se lancer dans la recherche photographique. Le procédé nouveau cherche une légitimité artistique en s’intéressant aux monuments et aux œuvres, qui de plus offrent à l’opérateur leur immobilité, essentielle car les temps de pose sont forts longs. Enfin les jeunes Anglais, lors de leur Grand Tour, transportent avec eux leur « nécessaire » à calotype et trouvent en Italie un terrain de choix pour ce qui est des sujets.<o:p></o:p>

    Au Caffè Greco se réunissent et discutent artistes et photographes. Là naît ce qu’on appellera plus formellement l’Ecole romaine de Photographie, avec Giacomo Caneva, Luigi Sacchi, Vero Veraci. On y croise des Anglais, le pasteur Richard Calvert Jones, formé par John Talbot, et Albert Robinson qui adapte à la lumière italienne le calotype mis au point sous le ciel anglais ; l’Ecossais James Graham. De nombreux Français – le Caffè Greco est proche de la Villa Médicis – mériteraient d’être mentionnés : Alphonse Davanne, Gustave Le Gray, Frédéric Flachéron, Victor Régnault ; Eugène Piot, dont la publication en fascicules de L’Italie monumentale (1851-1853), est un échec commercial mais une étape importante ; Edouard Delessert qui publie lui un album de quarante photographies prises en Sardaigne (1854).<o:p></o:p>

    Les photographes prennent de l’assurance, s’intéressent à l’actualité. Les événements politiques ne paraissent pas indignes (siège de Rome, 1849 ; expédition de Garibaldi, 1860). La circulation des images accompagne le cheminement vers l’unité nationale en rendant perceptible aux Italiens le patrimoine commun, de Venise à Syracuse en passant par Rome : les paysages, les costumes, les monuments.<o:p></o:p>

    En 1850, l’innovation vient d’Angleterre. Le sculpteur Frederick Scott Archer met au point un négatif verre au collodion. Le procédé associe la précision du daguerréotype, la reproductibilité du calotype, et les dépasse tous deux en raccourcissant le temps de pose de manière significative. Le transport du négatif verre, plus délicat que celui du négatif papier, et la mécanisation progressive du tirage ont pour conséquence la professionnalisation : le métier de photographe est né. Les frères Alinari créent à Florence leur agence, encore en activité. Un magnifique tirage de Leopoldo Alinari (une forêt près de Pise), accompagné de son non moins magnifique négatif verre, montre le pas technique franchi, les ressources artistiques offertes.<o:p></o:p>

    Les négatifs sont un autre monde. La nuit qu’ils paraissent être n’y est pas l’inverse du jour (illustration). Les graveurs connaissent l’inversion du motif, mais l’inversion des valeurs reste mystérieuse. En faisant cet « Eloge du Négatif » en Italie, les commissaires auraient pu outrepasser la période choisie (1846-1862) pour clore l’exposition par un rappel de la surprise extraordinaire qui frappa Secondo Pia fin mai 1898 lorsqu’il photographia le Saint Suaire. Ce que découvrit cet avocat, photographe amateur, lors du développement du négatif, personne ne prétendra s’en être remis. On sait, depuis, que le Saint Suaire est le plus inexplicable des négatifs.<o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    Eloge du négatif, Les débuts de la photographie sur papier en Italie (1846-1862)<o:p></o:p>

     Jusqu’au 2 mai 2010, Petit Palais. <o:p></o:p>

    illustration : Gustave de Beaucorps, Rome, San Pietro in Vincoli © collection privée<o:p></o:p>


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