• musée Guimet

    Au musée Guimet<o:p></o:p>

    Un musée en vie<o:p></o:p>

    Présent du 15 septembre 07<o:p></o:p>

    La mort guette tout musée, une mort lente par routine, quand les collections dépérissent dans un environnement vieilli, surveillées par un gardien anémique sous l’œil désabusé du conservateur. Horrible tableau ! que n’offre pas, heureusement, le musée Guimet, dont le dynamisme est indéniable. <o:p></o:p>

    Créé en 1889 pour abriter la collection de l’industriel Emile Guimet (1836-1918), le musée s’est enrichi depuis grâce aux expéditions et fouilles en Extrême-Orient, au transfert dans ses murs du musée indochinois du Trocadéro et de la section des arts asiatiques du Musée du Louvre, mais aussi bien sûr grâce aux dons (en particulier les donations de l’éditeur Michel Calmann, de l’antiquaire Robert Grousset, de Jean et Krishnâ Riboud). Seul un musée vivant donne envie à un passionné de léguer une œuvre.<o:p></o:p>

    Sa bibliothèque et sa photothèque sont un outil de travail apprécié pour la recherche, qu’Emile Guimet lui-même a pratiquée et encouragée en fondant la Revue de l’histoire des religions et les Annales du Musée Guimet, dans lesquelles, par exemple, Georges Dumézil a publié ses deux premières études de mythologie indo-européenne comparée (« Le Festin d’Immortalité » en 1924 et « Le problème des Centaures » en 1929).<o:p></o:p>

    Rénové à la fin des années 90, le musée des Arts asiatiques accroît son fonds en suivant une ligne précise : les collections sont organisées de manière à illustrer la diffusion de l’iconographie religieuse indienne dans l’Asie orientale. Donations généreuses et mécénat d’entreprises ont permis de combler des lacunes importantes. Le musée propose ces mois-ci un parcours dans l’ensemble du musée à la rencontre de quelques deux cents œuvres parmi les six mille acquises en une décennie, repérables par une signalétique propre. <o:p></o:p>

    Les terres concernées, de l’Inde au Japon en passant par la Chine, la Corée, le Népal, l’Asie du Sud-Est et les pays en –stan, la période en jeu, plus de deux millénaires, rendent impossible tout panorama, toute synthèse. Quand on n’est ni un généraliste, ni un expert en art de telle période dans telle région, on en a le tournis. J’ai donc eu le tournis et puissiez-vous l’éprouver aussi car il y a de belles choses à voir.<o:p></o:p>

    En sculpture, trois Bodhisattva retiennent l’attention : un de la fin VIIIe, japonais, et deux du Xe siècle, chinois. La taille est ferme, les volumes jouent bien, les plans sont découpés que c’en est un plaisir pour l’œil. Un Bouddha marchant (bronze), représentatif de l’art thaï du XVIe, dit style sukhothaï, au visage typé, est à l’opposé de ces sculptures : c’est un art de lignes et non de volumes, ce qui apparaît pleinement de profil. Tout cela est supérieur à un Bodhisattva himalayen (X-XIe siècles), où les détails l’emportent sur l’ensemble, trop orné qu’il est, enguirlandé.<o:p></o:p>

    Si l’ensemble est nettement bouddhique, la Chine antérieure se fait remarquer par des sculptures religieuses en bois assez étonnantes (illustration) : remontant aux Ve-IIIe siècles avant J.-C., ce sont des animaux protecteurs des tombes, tous munis plus ou moins à juste titre d’andouillers, comme cet oiseau phénix juché sur un tigre, dont les bois remplacent audacieusement les ailes.<o:p></o:p>

    Les paravents appartiennent à une philosophie de l’ameublement typiquement asiatique, et ici, coréenne. Tous n’ont pas la même inspiration. Poésie picturale d’un paravent joliment coloré, représentant un coq jaune pâle dans un paysage gris anthracite, vert et rouge brun. Ou poésie littéraire de ce paravent au dessin grisé qui rappelle les Chinois, avec les quatre gentilshommes et les trois amis – les quatre gentilshommes sont le bambou, le prunier, l’orchidée et le chrysanthème ; les trois amis le rocher, le pin et le bambou, thèmes chers aux lettrés. La poésie peut aussi être décorative lorsque le paravent simule un autre meuble : des étagères sont représentées en trompe-l’œil, s’y s’empilent livres et objets.<o:p></o:p>

    Restons dans l’ameublement avec des toiles peintes de l’Inde. Il s’en fabriquait de deux sortes : religieuse à l’usage des temples locaux, décorative à destination du Moyen Orient et de l’Europe. En 1686, les importations d’indiennes représentaient les trois quarts des bénéfices de la Compagnie française des Indes orientales ; les fabricants français firent interdire ces importations qui leur étaient nuisibles, et la Compagnie coula.<o:p></o:p>

    Une histoire touchante, pour terminer. Une tête féminine khmer (en grès) est arrivée au musée Guimet grâce à un donateur en 2006. En elle-même elle constituait un beau cadeau, mais le plus beau c’est qu’elle s’est trouvée s’ajuster parfaitement à une autre sculpture du musée, une divinité exhumée sans sa tête en 1935, au Cambodge sur le site de Bakong. (La tête avait été trouvée à proximité quatre ans plus tard.) Que souhaiter de plus au bonheur d’un conservateur ? <o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    De l’Inde au Japon, 10 ans d’acquisitions, <o:p></o:p>

    jusqu’au 13 décembre 07, Musée Guimet<o:p></o:p>

    illustration : Grand phénix, Chine du Sud © Thierry Ollivier / RMN<o:p></o:p>


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