• Pastel

    Au musée d’Orsay<o:p></o:p>

    Pastel, mon beau pastel<o:p></o:p>

    Présent du 25 octobre 08<o:p></o:p>

    Le musée d’Orsay, après l’aquarelle, s’intéresse au pastel. Cette approche par technique est une excellente démarche. Le pastel relève-t-il de la peinture ou du dessin ? Son conditionnement, des bâtonnets de pigments liés, le range dans la catégorie du matériel de dessin ; ses nuances de coloris, ses possibilités picturales le classent dans les techniques du peintre. Mais la peinture permet une part de tricherie, alors que le dessin n’en autorise aucune : à cet égard le pastel appartient au domaine du dessinateur. Une mauvaise peinture a la capacité de se fondre dans son environnement, un pastel raté blesse l’œil. Il dénonce l’infériorité d’un artiste aussi sûrement qu’un mouchard signale une discrimination. Il est efficace comme un coup de fil à la HALDE (08 1000 5000, coût d’une communication locale). <o:p></o:p>

    L’âge d’or du pastel, c’est le XVIIIe siècle, mais le XIXe n’a pas dérogé. Les Romantiques puis les Modernes l’ont mené plus loin. Cela n’a pas été sans réhabilitation. Le néo-classicisme l’avait méprisé pour sa volatilité jugée indigne de l’héroïsme de l’inspiration, pour sa féminité inacceptable dans un contexte de peinture prétendue virile. Il est vrai que des couleurs douceâtres et une facilité à obtenir des fondus en estompant, en faisait une occupation idéale pour jeunes filles au pensionnat. Il a fallu que des artistes fondassent, en 1885, la Société des Pastellistes français pour qu’il soit reconnu comme un moyen honorable de s’exprimer.<o:p></o:p>

    L’histoire d’une technique est faite de hauts et de bas, d’autant plus en ce qui concerne le pastel qui, je l’ai dit, est impitoyable ; je suis tenté de classer les pastels exposés en deux groupes, les mauvais et les bons, laissant à chacun le soin de nuancer. <o:p></o:p>

    A mauvaise école, mauvais pastel : les portraits mondains de la fin du dix-neuvième siècle révèlent les visages des femmes qui traînent dans les nouvelles de Maupassant, de ces petites têtes de garces au sourire équivoque, jolies un instant plutôt que belles à jamais, pour lesquelles l’artiste éprouve une complaisance qui se sent jusque dans sa manière de caresser le papier. Paul-César Helleu (1859-1927) est un représentant du genre, Lucien Lévy-Dhurmer aussi (1865-1953), à qui une salle entière est consacrée : il ajoute à la mondanité un insupportable mélange, hétérogène, de symbolisme et de naturalisme. Les réalistes comme Victor Prouvé ou Albert Besnard tombent dans la viande. On aime à la rigueur le Portrait de Mme Amandine, par Marie Bashkirtseff. <o:p></o:p>

    D’Edouard Manet (1832-1883) – ici commence le groupe des forts –, peu de pastels, pour l’essentiel des portraits féminins, d’un art tout autre. Une brune piquante à la bouche fruitée ; Irma Brunner sur fond gris, son visage pâle resplendit entre chapeau noir et robe saumon. Manet tenta quelques nus après avoir vu ceux de Degas.<o:p></o:p>

    Edgar Degas (1834-1917) : ses impérissables danseuses (illustration), ses nus à la toilette et ses modistes n’ont plus besoin d’être présentés, mais leur audace technique mérite d’être rappelée. Degas se battit longtemps contre le travail poudreux du pastel. Il le mêla à la gouache, à l’essence, expérimenta des fixatifs. D’heureux hasards provoquèrent des effets inattendus, de moins heureux des accidents. Quand enfin il eut résolu la fixation des couches, il eut en main un outil qu’il préféra à l’huile. Sa vue baissant, il le travailla encore plus puissamment, par masses hachurées. La saisie du mouvement des danseuses, la saisie des attitudes les plus vraies d’une femme à la toilette, se coiffant, d’une cliente essayant un chapeau, il sut rendre tout cela par le pastel dans des compositions osées.<o:p></o:p>

    Coulisses, baignoires, ce sont des moments d’intimité où jamais n’affleure le voyeurisme, des instants quotidiens sans rien de terre à terre. Il y a un respect du réel où le prosaïsme est dépassé. Les pastels de Jean-François Millet ont aussi cette qualité : travaux des champs, travaux de la ferme (La baratteuse, La femme au puits), les gestes quotidiens se situent sur un plan élevé, comme dans une histoire de Ramuz.<o:p></o:p>

    Loin du réel se tient Odilon Redon (1840-1916), le meilleur fruit de l’école symboliste. Le Char d’Apollon (pastel et peinture sur toile), quatre chevaux blancs vacillant dans des cieux féeriques, efface les précédents académiques sur le même sujet. D’une façon générale l’étrangeté de la rêverie est déroutante ; monde clos sur lui-même, ouvert à toutes les interprétations. Lorsque le réel est effleuré, il reste mystérieux : à quelles méditations se livre cette jeune fille au bonnet bleu ? Dans un vase, des fleurs des champs composent un bouquet enchanté, cueilli par une Dame ou une Masque, dont l’intention ne nous est pas connue.<o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    Le mystère et l’éclat, Pastels du musée d’Orsay, <o:p></o:p>

    jusqu’au 1er février 2009. Musée d’Orsay<o:p></o:p>

    Illustration : E. Degas, Danseuses © Musée d'Orsay, RMN / © Patrice Schmidt<o:p></o:p>


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