• Prohibition sournoise

    Prohibition sournoise

    La scène se passe dans une brasserie parisienne, à l’heure du déjeuner. Audrey boit du vin blanc pour accompagner son poisson. Ce soir elle fêtera un anniversaire, au champagne. Sébastien aime les soirées entre amis, il doit penser à acheter bières et whisky. Jacques boit une bière au comptoir, avec son sandwich, et au dîner il ouvrira une bonne bouteille. Alors cette question angoissante se pose : « Etes-vous sûr de tout connaître sur les risques liés à l’alcool ? »

    Tous coupables ! proclame le film de l’INPES (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé), dont le titre est explicite : « Boire un peu trop tous les jours, c’est mettre sa vie en danger ». Le Rapport mondial de l’OMS sur l’alcool (Présent du 15 février) incitait les gouvernants à renforcer la lutte. L’INPES se conforme à l’incitation en lançant cette campagne télévisée, qui vise surtout les plus de 40 ans, les hommes en priorité, et blancs, tant qu’à faire : ici pas de métissage, pas de minorités ethniques, pas de quotas : en scène, Audrey, Sébastien et Jacques, vous et moi, Olivier et Pierre, abominables alcooliques en devenir, épaves futures, Titanic en quête de glaçons.

    Pourquoi cette stigmatisation ? Les quadragénaires et autres quinquas auraient tendance à sous-estimer les risques liés à leur consommation, qui leur paraît anodine mais est en réalité « excessive » : supérieure à 3 verres par jour, pour… 15 % de la classe d’âge. Autant dire qu’en réalité très peu de gens sont concernés par une soif qui reste au fond légitime, mais peu importe c’est un mode de vie alimentaire et social qui est visé, une culture. Il est vrai qu’on prétend nous terroriser avec cet autre chiffre, celui des habitudes de consommation ponctuelle importante : les hommes de plus de 40 ans déclarent (avouent ?) avoir bu au moins 6 verres ou plus, en une même occasion, au cours des 12 derniers mois. Ça paraît raisonnable et festif.

    A la suite du film, un test est proposé pour tester vos connaissances et visualiser la quantité d’alcool que vous, Audrey, Jacques ou Sébastien, consommez en une semaine, en équivalent whisky, vin et bière. N’allez pas parler à l’INPES de mojito, de caïpirinha ou de Bloody Mary, ce serait abuser de sa tolérance. La campagne télévisée, visible sur internet, vous renvoie, buveur pénitent, à un site où assistance médicale et psychologique vous sera prodiguée (alcoolinfoservice.fr), ainsi qu’à un numéro : 0 811 91 30 30. Vous pouvez aussi téléphoner à un ami et l’inviter à boire un verre en terrasse – avec modération, bien sûr.

    Martin Schwa

    Article extrait de Présent
    du Samedi 12 mars 2011

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