• Vitrail médiéval

    Au musée de Cluny

    Eclats et reflets

    Présent du 04/11/2006

    Une exposition au Musée de Cluny, si modeste soit-elle, n’est jamais décevante. L’intérêt de l’exposition qui vient d’ouvrir, « Pinceaux de lumière – Du modèle au vitrail », est de présenter côte à côte des vitraux et des enluminures, des vitraux et des gravures, pour souligner le lien entre vitraux et images. C’est ainsi qu’on voit, du XIIe au XIVe, l’iconographie des enluminures se transcrire dans les vitraux, puis petit à petit les vitraux être marqués par l’aspect de la gravure jusqu’à en devenir la copie parfois conforme. A cette évolution iconographique correspond une évolution sociale : dans la première période les réalisations (enluminures ou vitraux) sont des commandes prestigieuses passées par les élites religieuses et seigneuriales, des « pièces uniques ». Dans la dernière, l’image se popularise par la gravure et ce sont les « bourgeois » qui achètent un verre à peine plus grand qu’un CD pour orner une fenêtre de leur logis.<o:p></o:p>

    Du XIIe au XVe, les maîtres verriers exécutent les projets des peintres adonnés par ailleurs à l’enluminure, d’où une affinité de coloris et de compositions. Quelques beaux vitraux sont présentés, en particulier, comme ce Miracle du pin, un épisode de la vie de saint Martin (voir ill.), provenant peut-être de l’abbaye de Gercy et datant des années 1230.<o:p></o:p>

    Une transition s’amorce au XVe : l’enluminure perd sa vigueur au profit de la gravure. Une beau vitrail de l’Annonciation (alsacien, vers 1460) témoigne de cette évolution : il est plus détaillé, plus dessiné, mais les masses demeurent par l’emploi de verres colorés très contrastés.<o:p></o:p>

    La dernière période (fin XVe-début XVIe) est illustrée par le rondel, ou griset : un verre rond, laissé transparent par endroits, teinté au jaune d’argent à d’autres, et nuancé de traits gris, qui s’insérait dans la partie supérieure et dormante d’une croisée. L’arrivée de ces ornements à usage domestique correspond à l’expansion de la peinture de chevalet qui se produit au même moment. Si les rondels témoignent de la réussite de la bourgeoisie, ils reflètent aussi sa piété : saints patrons, sujets bibliques, de nombreuses Vierges donnant le sein ; le profane n’est pas absent. Malgré le nom de vitrail qui leur est donné, ils n’ont plus grand-chose en commun avec les vitraux : le verre n’est plus matériau de réalisation, il n’est que support. Cependant le jeu contrasté de blanc et de jaune arbitré par des grisés leur confère un grand charme et sied parfaitement à leur rôle tant ornemental que dévot.<o:p></o:p>

    Un des morceaux les plus réussis à mon goût est le rondel représentant Sainte Eugénie, palmigère et encadrée d’un fraisier (symbole de la tentation qu’elle repoussa) et d’un œillet (symbole de ses fiançailles avec le Christ) – dont la vie est relatée dans la Légende dorée (voir ill.) : la sûreté du trait, la répartition des zones colorées en font un chef-d’œuvre. Tous les rondels n’ont pas cette qualité : le succès de ces ornements fut tel qu’ils devinrent l’objet de productions en série – ce qui se traduit toujours par une médiocrité. Quant à ceux qui transcrivent exactement une gravure, ils ont un intérêt iconographique plus qu’artistique, le cas le plus frappant étant celui d’un rondel reprenant scrupuleusement une gravure de Hans Wechtlin (Vierge à l’Enfant dans le jardin, vers 1510) : on touche du doigt l’absurdité technique puisque le verre n’est plus travaillé suivant ses qualités propres. C’est finalement le pinceau qui s’empare du vitrail au lieu de l’inspirer.<o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

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    Pinceaux de lumière – Du modèle au vitrail,

    Musée de Cluny, jusqu’au 15 janvier 2007


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