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Vlaminck, un instinct fauve
Au musée du Luxembourg<o:p></o:p>
Vlaminck ou les limites de l’instinct<o:p></o:p>
Présent du 1er mars 08<o:p></o:p>
Cinquante ans après la mort de Maurice de Vlaminck, et cinquante-deux ans après la dernière grande exposition à lui consacrée, le Musée du Luxembourg ouvre ses salles aux peintures de la période 1900-1915, années durant lesquelles le peintre a donné le meilleur de lui-même.<o:p></o:p>
Vlaminck en 1900 est un jeune homme au physique de lutteur de foire, qui donne des cours de violon, pédale, canote et peint dans sa banlieue natale qu’il aime par-dessus tout, Chatou, Le Vésinet. Sans un rond, il y mène une vie saine, préférant « la friture de gardons et le petit vin d’Argenteuil » au Pernod et à l’Amer-Picon servis à Montparnasse. « L’atmosphère de la bohème intellectuelle m’accablait et me rendait neurasthénique. Il me fallait le grand air, loin de Paris, des attirances féminines, des amours indigentes et sensuelles, au goût de malheur et de crasse, loin de l’odeur des plumards et des lavabos, des chambres meublées. » (Portraits avant décès, 1943)<o:p></o:p>
Dans le train Chatou-Paris, Vlaminck fait connaissance de Derain. Ils vont ensemble sur le motif, louent comme atelier une baraque désaffectée ; de cette collaboration naîtra le fauvisme. Vlaminck prône la couleur pure, sortie du tube, et la touche virevoltante. Cette manière doit beaucoup à Van Gogh, dont la peinture lui a été révélée en 1901 à la galerie Bernheim-Jeune. Mélanger les tons ou assagir ses brosses signifieraient marquer un temps de réflexion, raffiner : or Vlaminck veut rendre l’émotion violemment ressentie devant le motif, « extérioriser son sentiment » face à la fraîcheur d’un bord de Seine, « fixer le réalisme romantique » d’un sordide paysage de banlieue. <o:p></o:p>
Les toiles éclatantes s’accumulent : La Châtaigneraie à Chatou, dont le sol est une juxtaposition de tons purs qui rappellent les bonbons Dragibus ; les célèbres Péniches au Pont de Chatou (illustration)... Couleurs pures, tons vibrionnants : l’harmonie et la force sont indéniables.<o:p></o:p>
Cependant, passé l’exposition du Salon d’Automne de 1905 où Vlaminck triomphe, entraînant dans son sillage Derain, Matisse, Marquet, Van Dongen, faisant affaire avec le marchand Ambroise Vollard qui achète toute sa production, le fauvisme patine : Vlaminck a atteint les limites de sa technique. La couleur pure, lui disait déjà Derain, « c’est une théorie de teinturier ! » Le fauvisme, souvent présenté comme libérateur, apparaît donc plus comme un aboutissement qu’une naissance. En quelque sorte – si une touche d’anachronisme est permise, mais dans le domaine des idées en est-ce un ? – c’est la victoire des Rubénistes sur les Poussinistes, et l’épuisement du vainqueur. Limite de l’émotion alors que la réflexion aurait permis d’évoluer. Cela, Vlaminck ne voudra jamais l’admettre. Cézanne est pour lui trop intellectuel, la peinture de Gauguin cérébrale, « dépourvue d’émotion naturelle », comme il l’explique la vieillesse venue. Il y a de l’ingratitude dans ce jugement car l’exposition Cézanne de 1907 (le maître était mort l’année précédente) lui avait permis de sortir de l’impasse.<o:p></o:p>
Déjà dans des études de fleurs de 1905-1906, dans des paysages et des natures mortes, la touche était moins débridée, plus verticale, « tapissière », les couleurs nuancées. L’influence de Cézanne accentua cette évolution. Une série de natures mortes de 1906-1907 montre l’apport fécond du maître d’Aix. Vlaminck peint même des Baigneuses, et une composition savante (L’île Saint-Germain à Boulogne-Billancourt), mais est-ce encore lui ? on l’y cherche. <o:p></o:p>
S’ensuit une série de paysages mi-cézanniens mi-cubistes, aux lointains en bleus doux (L’église du bourg, 1910), aux lumières d’orage (Bord de rivière, 1909). Vlaminck en demi-teintes, qui l’eût cru ? Le cubisme n’est que frôlé, qu’une tentation, en raison de sa nature hyper-artificielle. Le cubisme, « Picasso en fut l’accoucheur, Guillaume Apollinaire la sage-femme, Princet le parrain ; les assistants : Derain, Max Jacob, Braque, Juan Gris, Salmon et moi-même. » Connaissant le personnage, Vlaminck aura des pages cruelles sur Picasso le truqueur, sur le cubisme des pages justes : « En manière de boutade, on pourrait dire qu’en raison de ses tendances individualistes, libertaires, si quelqu’un avait dû personnifier le Fauvisme, c’eût été Ravachol. De même que le Cubisme, spéculateur et profiteur, l’eût été par Stavisky. »<o:p></o:p>
Après la Grande guerre, Maurice de Vlaminck n’apporte rien de nouveau, ce qui en soi n’est pas grave ; mais il tourne en rond. André Derain donnera une œuvre plus conséquente, inscrite dans la durée. Le fauvisme n’est qu’un instant de l’histoire de la peinture, mais son éclat ne faiblira pas.<o:p></o:p>
Samuel<o:p></o:p>
Vlaminck, un instinct fauve,
jusqu’au 20 juillet, Musée du Luxembourg<o:p></o:p>
illustration : Les Péniches à Chatou © The Museum of Fine Arts, Houston / ADAGP Paris 2007<o:p></o:p>
Tags : Vlaminck, peinture XXe, fauvisme
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Commentaires
1GwenhMercredi 2 Décembre 2009 à 19:02je suis un peu tard pour écrire, mais vlaminck m'a jeté dans un pot de peinture dont je ne peux m'extraire !Répondre
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