• Zucca (André)

    A la Bibliothèque historique de la Ville de Paris<o:p></o:p>

    Christophe Girard entre en résistance<o:p></o:p>

    Présent du 23 avril 08<o:p></o:p>

    L’exposition Les Parisiens sous l’Occupation présente un bel ensemble de clichés d’André Zucca (1898 – 1973). Photographe de presse reconnu à partir de 1937, il est correspondant de guerre pour France-Soir et Paris Match en 1939, et travaille pour Signal, magazine de propagande allemande, à partir de 1941. Cela lui vaut le privilège de travailler avec des pellicules couleurs et de parcourir Paris en tout sens et toute liberté. A la Libération il perd sa carte de presse et doit se résigner à faire les mariages et les premières communions sous pseudonyme à Dreux.<o:p></o:p>

    Les deux cent cinquante photographies, tirées du fonds de la Bibliothèque Historique, risquent d’être remballées presto avant le 1er juillet, date initialement prévue pour la fermeture : Christophe Girard, adjoint à la Culture, bien que faisant partie du Comité d’Honneur de l’exposition en compagnie de Bertrand Delanoë, vient d’en demander l’arrêt. La découverte des photos lors du vernissage aurait fait vomir cet élu en charge du Patrimoine et de la Mémoire dans le 4e. (Vous pouvez l’invoquer si vous avez perdu vos clés et que vous êtes domicilié dans le Marais. Sinon, voyez saint Antoine.) <o:p></o:p>

    En quoi consiste le caractère émétique du travail d’André Zucca, « dont la valeur propre présente un intérêt historique et artistique incontestable » ? Il « donne à voir un Paris léger, voire insouciant » (communiqué de presse) Rien sur les rafles ni sur la Résistance. Pas bête pour deux sous, Girard a « immédiatement compris la manipulation derrière de prétendues belles images. » (interview au Journal du Dimanche)<o:p></o:p>

    Les Parisiens peuvent en effet découvrir, à travers ces photos, que sous l’Occupation on emmenait les enfants au Guignol, on jouait au loto, à la belote, on allait au cinéma, à la foire du Trône ; que les femmes se maquillaient, achetaient de la lingerie, portaient des chaussures à semelles compensées. Etes-vous bien assis ? A Ménilmontant on mangeait même des cerises… L’obligation d’avoir une lumière vive pour utiliser les pellicules Agfacolor explique l’ambiance ensoleillée, véritable inconvenance en ces heures sombres. La couleur rend les clichés encore plus troublants : la distanciation du noir et blanc n’opérant plus, ces images sont presque celles d’un Paris que nous connaissons.<o:p></o:p>

    Bref, les photographies remarquables d’André Zucca vont à l’encontre de la vulgate, en montrant que sous l’Occupation la vie quotidienne continuait et qu’au printemps les Parisiennes étaient pleines de charme. Des laiderons par temps bas eurent moins gêné Chr. Girard, particulièrement choqué par la photo d’un couple d’amoureux au jardin du Luxembourg, un exemplaire de Signal posé près d’eux. Un couple hétérosexuel, qui plus est. Le regard oblique d’un passant trop honnête ? Les photos relèvent, d’après lui, de la propagande. Les Allemands n’étaient pas de cet avis : aucune ne parut dans Signal. Les Censeurs ont souvent une sensibilité exacerbée.<o:p></o:p>

    La polémique a commencé peu après le vernissage. Désormais, un Avertissement est donné au visiteur pour qu’il n’aille pas conclure à l’inexistence des rafles, des files d’attente, etc. La promotion publicitaire par affichage a été suspendue. Bientôt peut-être des bassines seront-elles distribuées à ceux qui, comme M. Girard, ont l’estomac fragile. L’entrée des enfants même accompagnés sera-t-elle interdite ? J’imagine que notre élu tremble à l’idée que ses enfants tombent sur de telles images car il est Père comme les autres (Hachette, 2006 – comprenez « papa homosexuel »). Cette exposition est tellement inconciliable avec l’enseignement de l’Education nationale ! Des visiteurs bien intentionnés, citoyens fiables, ont d’ailleurs laissé dans le livre d’or des commentaires éloquents, conseillant par exemple aux organisateurs de « retourner à l’école » – pour réviser, sans doute.<o:p></o:p>

    En février dernier, Jean-Marie Le Pen et Camille Galic ont été lourdement condamnés pour une entrevue parue dans Rivarol en janvier 2005, dans laquelle Le Pen déclarait qu’« en France du moins l’occupation allemande n’a pas été particulièrement inhumaine », propos qualifiés d’apologie de crimes de guerre et de contestation de crimes contre l’humanité. Que les photos d’André Zucca puissent illustrer ces quelques mots suffit pour deviner quelles sont les chances de survie de l’exposition. En attendant, le sursaut mémoriel de Chr. Girard a eu pour effet immédiat d’amener de nombreux visiteurs, dont votre serviteur, ravi de pouvoir désormais lire certaines pages de Léautaud avec un œil encore plus averti.<o:p></o:p>

    Samuel<o:p></o:p>

    Les Parisiens sous l'Occupation: photographies d'André Zucca,<o:p></o:p>

    jusqu’au 1er juillet ?<o:p></o:p>

    Bibliothèque historique de la Ville de Paris, 22, rue Mahler, 4e. Ouvert tous les jours sauf le lundi, de 11 h à 19 h. Entrée : 4 euros.<o:p></o:p>


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