• Des saucisses halal « frelatées »

    Scandale au rayon frais ! Le 14 janvier, un laboratoire nantais met en évidence, dans des saucisses de volaille de marque Knacki Herta certifiées halal, de l’ADN de porc. De l’ADN, pas de quoi tartiner, mais là n’est pas la question : le sujet est sensible. Nestlé, propriétaire de Herta, procède à une contre-expertise qui conclut à l’absence d’ADN. (Quel rebondissement ! On n’avait pas vu cela depuis l’affaire Drossard-Montand.) Malgré tout, le groupe suspend la fabrication des dites saucisses et les magasins Casino les retirent des rayons. Les consommateurs musulmans, largement dragués par ces grandes marques et par combien d’autres, avalent difficilement le chapelet.

    Le porte-parole de Nestlé-France reconnaît que le groupe « est pris dans un débat sur la certification halal » – il est surtout pris en flagrant délit de négligence, tout comme l’organisme certificateur, qui n’est autre que la Mosquée de Paris. Celle-ci se défend, on lui en veut, on jette le discrédit sur le halal. L’islamophobie rôde.

    En fait c’est le blog Al-Kanz, spécialisé dans la question, qui reproche à la mosquée de Paris et à Nestlé leur légèreté. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, la Société française de contrôle de viande halal (SFCVH) laisse l’industriel faire sa petite cuisine, elle se contente de tamponner (et, ne l’oublions pas, de toucher une taxe, dix centimes d’euro par kilo à peu près). Que, par commodité agro-alimentaire, du porc se retrouve dans des produits halal, est plausible.

    Voici ce qu’écrit le rédacteur d’Al-Kanz : « La SFCVH-Mosquée de Paris ne salarie pas de contrôleurs et en laisse le soin à l’industriel, juge et partie. C’est précisément pour cette raison que Nestlé, comme Fleury Michon, comme Zakia Halal, etc., a choisi cet organisme de certification. Une certification sans contrôle c’est le rêve. » Cet incident sera-t-il le moyen de parvenir à une normalisation, d’obtenir une certification halal estampillée « République française » ? Craignons-le.

    Al-Kanz continue : « Précisons que ce qui arrive à Nestlé ne relève pas de la boulette. Le directeur France du Département ethnique a été maintes fois mis en garde. » Nestlé a donc un « Département ethnique » (le 9-3 ?), dont le directeur a été mis en garde – charitablement ? et par qui ? Jusqu’à présent, il n’en avait fait qu’à sa tête. Gageons qu’à l’avenir il sera plus à l’écoute de sa clientèle, et tout disposé à ne pas métisser la saucisse.

    Martin Schwa

    Présent du 4 février 2011


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  • Du Beau dans la geôle

    Henri Loyrette, le directeur du Louvre, a inauguré le 26 janvier une exposition hors les murs : dix belles reproductions de tableaux de maîtres, bien encadrées, accrochées dans la cour de la prison de Poissy, intra muros. C’est l’aboutissement d’un projet entre le Louvre et le Service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) des Yvelines : dix détenus ont choisi les tableaux, écrit un commentaire.

    La centrale de Poissy, qui accueille les longues peines, se laisse imaginer aisément. Du Second Empire, du béton années soixante-dix, du disparate et de la laideur à vous boucher l’esprit à jamais. Et voici que Mantegna et le Caravage, Géricault et le Lorrain, Cuyp et d’autres, métamorphosent la geôle. « Belle clarté Chère raison », invoquait Apollinaire dans sa cellule, après le vol de la Joconde en 1911.

    Bien sûr, rire est toujours possible. Du Louvre qui déclare vouloir « lutter contre toute forme d’exclusion », de son directeur qui y voit « une nouvelle occasion de s’engager auprès des publics éloignés des pratiques culturelles ». Des poncifs.

    On pourrait aussi se gausser des propos des détenus impliqués dans l’exposition. Au sujet de L’arbre aux corbeaux de Friedrich, celui qui l’a choisi explique : « Je suis comme l’arbre sans feuilles en ce moment mais derrière il y a la lumière, l’espoir, la liberté. » Pourquoi en rire ? Ces propos ne relèvent pas du poncif. Ils relèvent du subjectif, et telle est la leçon : la culture pour tous, du flan ! Le Beau est objectif, mais la rencontre avec le Beau est avant tout une aventure individuelle. La marine de Cuyp rappelle à un détenu une sortie en mer lors d’une tempête : « Alors on n’est rien. Et ça, ça ne changera pas. En tout cas, c’est ce que j’espère. – On ne voit pas la même chose que vous. »

    Les conditions de détention dans les prisons françaises font de la vie quotidienne des prisonniers une gigantesque installation d’art contemporain, un happening sans espérance. La principale caractéristique de cet « art » est l’inhumanité d’œuvres qui revendiquent leur absence d’intériorité. Or l’art n’a de valeur que dans la mesure où il a une charge spirituelle. Celle-ci peut être explicite – la Crucifixion, par Mantegna, La Madeleine à la veilleuse de La Tour – ou implicite – le Portrait d’une femme noire de Benoist, La diseuse de bonne aventure de Caravage. Le supplément d’âme apporté par le Beau ne changera rien au système, mais réjouissons-nous pour les quelques prisonniers qui en bénéficient à cette occasion.

    Martin Schwa

    Présent du 1er février 2011

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  • Céline, persona non grata

    Au programme des « Célébrations nationales » de l’année 2011, figurent Franz Liszt, Georges Méliès, Théophile Gautier, Michel Foucault… Décédé en 1961, Louis-Ferdinand Céline y avait été inscrit. Protestation de Serge Klarsfeld !… Le président de l’Association des fils et filles de déportés juifs de France, il n’a rien contre la fiction, mais il n’aime pas Céline !…

    Le ministre de la Culture, vendredi soir, lors de la présentation qui avait lieu à l’Ecole des Beaux-Arts, s’est rangé à la consigne du lobby inexistant : Céline est radié des « Célébrations nationales ». A la rigueur on le fêtera, comme les autres Céline, le 21 octobre. En catimini.

    Le discours est intéressant. Frédéric Mitterrand a pris sa décision « non sous le coup de l’émotion ou de pressions contradictoires » mais en son âme et conscience, les mêmes âme et conscience qui défendaient en 2009 Roman Polanski. Notre ministre reconnaît le génie de l’écrivain mais regrette qu’il ait mis sa plume « au service de l’idéologie répugnante de l’antisémitisme d’une manière obsessionnelle ». Même si Céline a été illustré par Tardi et lu sur scène par Lucchini, reste que « la folie antisémite est une pathologie ». (Interrogation : en ce cas, la réponse à l’antisémitisme cessera-t-elle d’être pénale pour devenir médicale ? Les antisémites seront-ils bourrés de cachets de Mediator ?)

    « J’adresse mes félicitations à Frédéric Mitterrand d’avoir eu le courage de désavouer ceux qui, dans son ministère, ont laissé passer cette bourde », a déclaré M. Klarsfeld. Les « Célébrations nationales » sont définies par un haut comité, actuellement présidé par l’historien Jean Favier, qui dirige une équipe d’autorités prestigieuses. Qu’elles se le tiennent pour dit, par une autre autorité.

    Pour éviter à l’avenir tout dérapage dans les festivités de la mémoire nationale, le ministre appelle le haut comité à faire des propositions « soit pour définir un changement de la terminologie, soit pour construire une doctrine incontournable des objectifs de l’Etat dans ce domaine délicat » ; il est temps de définir « une frontière entre ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas ». Il va de soi que l’intrusion de Serge Klarsfeld est acceptable. Elle s’appuie sur une doctrine d’ores et déjà incontournable.

    « Je ne doute pas que le haut comité saura répondre sereinement à cette exigence qui est la mienne », enjoint Frédéric Mitterrand, « une exigence de transmission ». Laquelle ne passe pas forcément par la vérité, mais par les nouvelles technologies : « C’est pourquoi j’ai le plaisir de vous annoncer qu’à compter de cette année l’ensemble des anniversaires et des notices contenus dans le recueil [des Célébrations nationales] seront accessibles à partir d’une application pour les écrans tactiles, compatible avec la plupart des supports mobiles. » Un gadget ! Une bagatelle…

    Martin Schwa

    Présent, n° 7271
    du Mardi 25 janvier 2011

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  • L’Occidental est carnivore

    Des scientifiques néerlandais s’enthousiasment pour la gastronomie à base de vers et d’insectes. Ils prédisent que ces « viandes » seront, dans un avenir prochain, les ingrédients préférés des cuisinières. Une question de goût ? Pas vraiment, d’idéologie plutôt.

    Les vers et les insectes, riches en protéines et pauvres en lipides, constituent une alternative au bœuf, au mouton, au poulet, une alternative meilleure pour la santé et plus respectueuse de l’environnement. Avec dix kilos de végétaux, on produit six à huit kilos d’insectes, contre un kilo de viande seulement. Des insectes qui rejettent peu de gaz à effet de serre et de lisier.

    Lors d’une conférence sur le sujet, organisée à l’université de Wageningen, le buffet proposait une ganache au chocolat et aux larves, des rouleaux de printemps aux sauterelles, des quiches aux vers de farine. Les recettes sont infinies, et l’on imagine sans peine le raffinement d’une tartelette aux coccinelles, la texture d’un grouillis de blattes servi avec son écrasé de punaises, la douceur d’une marinade d’acariens sur un lit de hannetons. Les restaurateurs audacieux oseront les menus à thème : dîner de célibataires à base d’helminthes, déjeuner de dépressifs avec cafards en plat principal.

    Les insectes sont régulièrement consommés au Mexique, en Afrique et en Chine, alors pourquoi pas en Europe ? Les Européens ont un « blocage », explique un producteur de vers ; « les gens croient que c’est sale », explique Marcel Dicke, chef du département d’entomologie de l’université de Wageningen. Il ne s’agit donc pas tant de cuisiner que de changer la mentalité occidentale. La culpabilité de l’homme blanc réside aussi dans son alimentation, pour satisfaire ses appétits il n’hésite pas à polluer la planète, à assassiner ses frères mammifères. L’expression « cuisine bourgeoise » n’est-elle pas, en soi, une véritable provocation pour un altermondialiste ?

    La consommation de vers et d’insectes pose cependant des problèmes éthiques aux partisans de l’antispécisme (mouvement de libération animale qui revendique l’égalité du ciron et du philosophe) ; des questions pratiques dans la perspective d’une Europe islamisée : comment abattre sur le mode halal, ne serait-ce qu’un kilo de vers blancs ?

    Parmi les romans de Marcel Aymé, il en est un, sans prétention et récréatif, qui s’intitule Le Bœuf clandestin. L’histoire d’un honnête père de famille qui assume son végétarisme mais qui, en l’absence des siens, se ceint d’un tablier pour se préparer un bon biftèque. Devrons-nous entrer un jour dans la clandestinité pour déguster un pavé saignant, sauce au poivre ?

    Martin Schwa

    Présent, n° 7269
    du Vendredi 21 janvier 2011

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    VIE ET MORT DE MADAME ELISABETH<o:p></o:p>
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    Conférence du Professeur Jean de Viguerie<o:p></o:p>

     

    Le jeudi 2 décembre à 20h

    au Centre Bergère<o:p></o:p>


    9, rue Bergère 75009 Paris<o:p></o:p>

    (Paroisse Saint-Eugène-Sainte-Cécile)<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p><o:p></o:p>(Ligne 8 ou 9, Métro Bonne Nouvelle ou Grands Boulevards ; Ligne 7 métro Poissonnière)


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